PRELUDE :

Fixée à la date du 25 septembre, cette offensive se déclencha entre la vallée de la Suippes et la lisière ouest de la forêt d’Argonne. Le général JOFFRE considérait cette offensive comme l’opération principale de la campagne de 1915 et il la prépara pendant 3 moins avec soin.

C’est la première fois qu’on vit donner tant d’importance à la préparation d’artillerie. Elle commença le 22 septembre sans interruption, broyant les infrastructures des Allemands. Cette lutte de 12 jours porte dans l’histoire le nom de « Bataille de Champagne ».

LA PREPARATION :

A) le 2RM/du 1 RE arrive à Plancher les Mines dans la matinée du 1er septembre. Il est renforcé par un peloton de sapeurs comprenant :

-1 officier : lieutenant GALLOCHON, commandant la section de bombardiers.

-Un adjudant adjoint : l’A/C LAMARET.

-Une section de sapeurs de 36 hommes.

-Une section de sapeurs ouvriers d’art de 9 hommes.

-Et une section de bombardiers de 19 hommes.

Le Régiment est passé en revue le 5 septembre par le général CODET, commandant la Division Marocaine. Le capitaine LEROY est nommé officier de la Légion d’honneur. Le sous-lieutenant ARBAUD est décoré de la Médaille Militaire.

Ensuite le Régiment quitte Plancher les Mines pour s’installer à Pré-Besson et poursuit son instruction au combat. Le 13 septembre, le Régiment participe à une grande revue, en présence du Président de la République, pour la remise de son drapeau. Puis le Président de la République attache au drapeau la croix de guerre avec palmes.

A partir du 15 septembre, transport par voie ferrée des Unités pour un autre secteur du Front. Embarquement en gare de Champagney Le 18 septembre, les mouvements sont terminés. Le Régiment s’installe dans les deux petits bois de la côte 160, au nord-est de Suippes et procède à l’aménagement de boyaux de protection et d’abris pour résister à un éventuel bombardement de l’ennemi. Avec le 2éme RE, de nuit, le régiment procède à l’aménagement du boyau de Limagne, entre la côte 170 et la côte 158.

Le 21 septembre arrivée de renfort en provenance de Lyon sous le commandement du capitaine BERNARD, composé de 7 officiers et de 109 hommes.

L’achèvement des travaux aura lieu dans la nuit du 22 au 23 septembre. Le lieutenant De GIVRE est sérieusement blessé alors qu’il surveillait les travaux. Le colonel remet la Médaille Militaire au sergent EBEL devant le front du bataillon « B ».

L’attaque des positions ennemies est fixée au 25 septembre .Composition du Régiment :

-colonel COT

-Bataillon « A », commandant BUREL, composé de 4 compagnies :

-A 1 : capitaine LEROY, A 2 capitaine JUNOD, A3 capitaine FRANÇAIS, A4 capitaine AUGER.

-Bataillon « B », commandant DECLEVE, également à 4 compagnies :

-B 1, capitaine RUELLAND, B2 capitaine De SAMPIGNY, B3 capitaine CORTEL, B4 capitaine D’ALLENS.

B) Le 2 RM du 2 RE est en station à Plancher-Bas. Il travaille conjointement avec le Régiment frère à l’aménagement des boyaux de Limagne et de Navarre. Le Régiment est également passé en revue le 13 septembre par le Président de la République, qui lui remet son drapeau.

Ensuite mouvement du Régiment par voie ferrée au départ de la gare de St Hilaire le Temple, puis installation au parc de Nautivet et au camp de la Noblette.

En exécution de l’ordre d’opérations numéro 3 du 22 septembre de la 1ére Brigade, le Régiment quitte son bivouac le 25 septembre vers minuit.

Le bataillon « C » et la compagnie de pionniers se dirigent vers le boyau du Languedoc, les bataillons « D » et « G » et la compagnie de mitrailleuses vers le boyau de Lorraine.

JOURNEE DU 25 SEPTEMBRE :

Disposition de combat du 2RM du 1 RE :

Le bataillon « A », la compagnie de mitrailleuses MESNIL, la compagnie de mitrailleuses GABET quittent le bivouac à 01 heures et viennent se placer dans le boyau du Japon, entre le boyau de Navarre et celui du Nivernais.

Le bataillon « B » et la compagnie de pionniers partent à 02 heures et s’installent dans le boyau du Japon, entre le boyau de Navarre et la route de Souain.

Disposition de combat du 2 RM du 2 RE :

Le bataillon « C » et la compagnie de pionniers se dirigent vers le boyau du Languedoc. Les bataillons « D » et « G » et la compagnie de mitrailleuses vers le boyau de Lorraine.

Dans chaque bataillon on prend les dispositions préparatoires pour le combat : groupement des unités, repas froid, outil portatif au ceinturon, etc…

A 04 heures tout le monde est en place. L’attaque est déclenchée à 09 heures 15.

Le 2 RM du 2 RE reçoit l’ordre de se porter dans la tranchée de Marseille. Le mouvement s’exécute rapidement, mais subit quelques pertes du fait du bombardement ennemi : capitaine JUNG blessé, 4 hommes tués et 10 blessés.

A 11 heures le 2RM du 1 RE reçoit l’ordre de se porter à hauteur de la place de l’Opéra ; le 2 RM du 2RE reçoit l’ordre de se porter dans la partie ouest des ouvrages de Wagram. Ces mouvements s’exécutent dans une atmosphère de gaz lacrymogènes et suffocants. Mais déjà les unités subissent des pertes sensibles du fait de mitrailleuses allemandes pas encore détruites, et qui font perdre un grand nombre d’hommes.

Le 2 RM du 2 RE est engagé en premier. Malgré l’inefficacité des tirs de notre artillerie, les légionnaires s’emparent de la butte de Souain. Ce succès ouvre la voie à d’autres unités. Cette opération vaut au Régiment une citation à l’ordre de l’Armée.

Le Chef de Corps du 2 RM du 1 RE reçoit l’ordre de porter le Régiment dans les tranchées de 1ére lignes allemandes en nettoyant le saillant de Presbourg encore garni d’une mitrailleuse allemande qui balaie tout ce qui se présente. Le mouvement s’exécute sous le feu de l’artillerie allemande de gros calibre qui bat le terrain à parcourir.

La situation est critique, car les unités de la Légion subissent de lourdes pertes du fait d’un bombardement intensif. Elles restent sur leurs positions jusqu’à 16 heures 30.Puis se portent en sécurité dans les bois alentours.

JOURNEE DU 26 SEPTEMBRE :

Toute la journée le 2 RM du 2 RE reste en position d’attente aux abords de la route de Somme-Py. Le Régiment subit une série de bombardements qui oblige les hommes à se terrer.

Pertes : 3 tués, 56 blessés et 1 disparu.

Le 2 RM du 1 RE subit également toute la journée un bombardement intensif qui fait des ravages dans les rangs des légionnaires.

Pertes : tué ; lieutenant LESTRADE et 11 hommes. Blessés ; capitaine FRANCOIS, sous-lieutenant JOYEAU, sous-lieutenant MARTEAU et 93 hommes. Disparus ; 41 hommes.

JOURNEE DU 27 SEPTEMBRE :

Pour le 2 RM du 1 RE, qui bivouaque dans le bois jouxtant le boyau de l’Archiduchesse, la journée se passe à aménager des tranchées abris pour se protéger des bombardements incessants de l’ennemi, continuant à lui faire subir de lourdes pertes.

Pertes : Tué ; sous-lieutenant BOUTONNET et 10 hommes. Blessés ; capitaine LEROY, sous-lieutenant VOELKEL et 36 hommes.

Le 2 RM du 2 RE, vers 05 heures trente, reçoit l’ordre d’aller prendre une position plus élargie aux abords de la côte 171, dans les tranchées de Berlin et de Bohème, récemment conquises.

JOURNEE DU 28 SEPTEMBRE :

Les deux Régiments de Légion unissent leurs efforts dans le même secteur pour s’emparer de la ferme de Navarin, proche de la butte de Souain. Le 2 RM du 2 RE monte à l’assaut en premier, mais se heurte à un dispositif de l’ennemi imprenable. Le Chef de Corps, le lieutenant-colonel LECOMTE-DENIS est blessé. Il est provisoirement remplacé par le commandant ROZET.

Pertes : dans cette action le Régiment perd 10 officiers et 310 hommes. Puis à son tour le 2 RM du 1 RE reçoit l’ordre de continuer l’offensive sur la 2éme ligne ennemie et de s’emparer de la tranchée de la « Kultur ». Les légionnaires progressent sous un feu dense de l’artillerie allemande et se heurtent aux mitrailleuses installées dans cette tranchée. Les compagnies de tête sont presque anéanties. Tous les officiers et la plupart des gradés sont tués.

Pertes du 2 RM du 1 RE : tués commandant BUREL, les capitaines JUNOD, BERNARD, TORTEL, D’ALLENS, le lieutenant FRANICE, le sous-lieutenant GONAUX. Blessés ,12 officiers et 3 disparus. Hommes tués, blessés ou disparus : 608.

Les deux Chef de Corps rendent compte simultanément à l’Etat-Major de la Division qu’ils ne peuvent poursuivre leurs missions. Les deux unités sont alors mises en réserve et rejoignent le camp de la Noblette. Les deux Régiments, pour leurs actions, seront cités :

-« Au cours de cette attaque qui malheureusement ne pouvait réussir en raison de la solidité de la position allemande que notre artillerie n’avait pas suffisamment ébranlée, les légionnaires ont fait preuve comme le 9 mai, d’un entrain et d’un courage admirables. Ni les feux de barrage de l’artillerie, ni les tirs foudroyant des mitrailleuses n’ont provoqué la moindre défaillance et les hommes ont jusqu’au bout, malgré la perte de presque tous les cadres, conservé une superbe contenance. »

Ces actions ont permis aux autres unités du Corps d’Armée de percer les lignes allemandes et de prendre à revers l’ennemi installé sur la butte de Souain.

EPILOGUE :

Les combats se poursuivront jusqu’au 6 octobre. Quelques semaines plus tard fut créée le RMLE, le 11 novembre, avec les débris de ces 2 unités prestigieuses.

ANECDOTES :

Le caporal Frédéric SAUSER ,alias Blaise CENDRARS, perdit le bras droit pendant l’assaut de la tranchée de la « Kultur ».Ont été tués aussi François FABER, ancien vainqueur du tour de France et un jeune américain Henry FARNSWORTH, dont le père, en 1920, fit édifier sur les lieux où tomba son fils à SOUAIN en Champagne, un monument dédié à la Légion étrangère qui rappelle ce sacrifice.

SOURCES : JMO des deux régiments, archives.

Major (er) MIDY - FSALE