Bonjour à Tous !

Vous vous souvenez de moi ?

Je suis « Nono », créature issue de l’imagination exubérante de deux légionnaires-officiers, PyC et Momo (CM). Quand j’étais encore en activité de service, avant d’être rectifié d'état-civil, j’étais « Cabé », un personnage comme il en existe des milliers. Chaque légionnaire, à l’époque, aurait été heureux de m’avoir pour ami. Moi, caporal Cabé, à l’aise dans le milieu légionnaire, bien dans sa peau et on disait de moi que j’étais doté d’un esprit malicieux ainsi que d’une vive intelligence caractérisée par un tempérament explosif. Bref, j’étais un homme libre et heureux d’être légionnaire.

Je souhaite mettre un peu d’humour dans les rubriques de notre nouveau site de la FSALE et vous distraire, le temps d’un été et plus si affinité… En fait, je veux vous distraire avec mes exploits passés narrés sous forme de BD, vous conter aussi quelques bonnes anecdotes ainsi que remettre en mémoire quelques-uns de nos Anciens qui sombreraient dans l’oubli si nous n’en parlons pas.  

Je commence avec l’interview d’un de mes créateur, CM :

-       Nono : Bonjour CM, inutile de vous présenter, aviez-vous une anecdote à nous présenter pour alimenter cette nouvelle rubrique ?

-       CM : Bonjour Nono, oui bien entendu, en fait, je reste très nostalgique de la période où en 1970, j’étais avec Pyc à la rédaction de « Képi Blanc », lui, caporal " metteur en page" et moi, sergent "rédacteur-correcteur". Nous étions sous la direction d’un rédacteur en chef, Alain Gandy et du dessinateur Rudolf Burda. Ce que je souhaite aujourd’hui, c’est de parler de l’amitié fraternelle qu’affichaient ces deux personnages atypiques et hauts en couleur.

C’était hier !

Mais mieux qu’un long discours, je reprends ce qu’écrivait Gandy concernant son ami Burda.

"-       Monsieur, est-ce bien ici l’ambassade de France à Vienne ? demande un touriste étranger à un personnage en redingote, dans le vestibule d’un élégant bâtiment de la capitale autrichienne.

-       Parfaitement, Monsieur, répond le fonctionnaire avec un sourire heureux, en français, sans accent. Qui désirez-vous voir ?

Son sourire s’explique ; il est heureux de voir quelqu’un qui lui rappelle ses années de service sous l’uniforme français, à la Légion étrangère. L’Indochine où il a été volontaire pour sauter à Dien-Bien-Phu. La médaille militaire orne discrètement son revers d’huissier d’accueil. Une longue histoire, quinze ans avant de rentrer dans son pays avec le grade d’adjudant et de prendre sa retraite proportionnelle et d’accepter ce poste « honoris cum Lauda » à l’ambassade.

L’adjudant Burda, dont l’épouse française est tombée malade en Autriche, a obtenu, a la lecture de son élogieux dossier de services, de reprendre du service actif. Il retrouve son grade d’adjudant et son ancienne affectation,  à « Képi Blanc », où ses dons d’illustrateurs ont déjà fait merveille. Car c’est un véritable professionnel. Au cours de son intermède dans le civil à Vienne, des commandes d’affiches et des dessins publicitaires lui avaient déjà permis d’attendre les premiers versements de sa retraite. Burda fait merveille à « Képi Blanc », dont il est devenu le moteur artistique. Illustrations des articles, titrages, souvent mises en pages, pages d’humour, affiches, son style éclate dans la propreté et la rigueur du trait, l’élégance des proportions, le comique des caricatures. Ses personnages ne sont jamais méchants, l’humour jamais cruel, parce qu’on sent que l’auteur est de caractère sociable et même amical. Les administratifs de la revue se souviennent, peut-être, des accès de satisfaction bruyants de Burda et de son pair de la rédaction, à la vue d’une page réussie qui les faisaient, à eux deux, imiter tout un couvent de moines orientaux en prières, marmonnements et cornes de brume.

En service au camp d’Arue à Tahiti, j’ai eu l’occasion d’assister à une réussite culturelle du commandement ! toutes les voies de communication de ce camp de plusieurs dizaines d’hectares furent baptisées d’un nom de peintre mondialement célèbre.

Depuis, je suis heureux de me dire qu’au bord de la place d’armes du camps d’Arue, un petit square de vingt mètres carrés porte, au coin d’une baraque, une plaque bleue réglementaire timbrée des mots : « Square Burda ». Il paraît qu’il a ri quand il a lu la « lettre d’ailleurs » de ce mois là.

Que je sache, la plaque est toujours là."

 

Nota de CM:

La crèche selon Burda. Elle représente une crèche où des légionnaires de toutes les époques regardent regroupés "quelque chose" caché qu'entoure un aura de lumière.

Burda marque ainsi une crèche originale qui peut-être utilisée par toutes les religions et même par les laïques, il n'en reste pas moins vrai qu'elle représente aussi et malgrè tout  le "Noël légionnaire".

 

Et pour compléter, ces écrits du lieutenant-colonel (er) Antoine Marquet:

"Tous les anciens connaissaient Burda. Ce sous-officier était attaché à Képi blanc de telle manière que beaucoup n’imaginaient le soldat qu’il a été.

Combien savaient qu’il avait sauté sur DBP ? Peu sans doute, il ne s’en vantait pas.

Je l’ai mieux connu au 5ème  étranger. Moi jeune lieutenant et lui adjudant-chef, calme, souriant, toujours de bonne humeur qui exerçait ses talents au sein du BCET (bureau coordination, emploi, travaux). Un bureau d’instruction adapté à celle-ci et aux travaux de grande ampleur que constituaient en ce temps-là l’importante mission du 5ème Régiment Mixte du Pacifique.

Burda était « au four et au moulin », il y avait peu de personnel dans son service et l’intensité du travail était quasi démentielle. Le béton était coulé jour et nuit au rythme des marées et Burda trouvait encore le temps de peindre et dessiner !

Tout ce qui devait être illustré l’était par Burda… Il en a donné du crayon et du pinceau !

C’est ainsi que pour répondre à la volonté du chef de corps j’ai demandé à Burda de dessiner un foulard pour le 5. Il l’a fait avec une maestria qui a étonné plus d’un.

Après la construction du mur de protection de la zone vie de l’atoll où nous vivions, nous nous sentions un peu emprisonnés en plein milieu de l’océan. De nos fenêtres nous avions vue sur l’immensité du Pacifique et soudain nous ne voyions qu’un mur de béton...

Le Comsites de l’époque, homme de grandes idées, surtout quant elles arrivaient du 5ème  étranger, a décidé de lancer un concours pour décorer le mur afin qu’il s’inscrive mieux dans le paysage. Les taggers actuels s’en seraient donnés à cœur joie.

Et revoilà notre Burda à l’œuvre… Il a préparé de très belles maquettes dont le dessin retraçait l’histoire du grand 5 (Te nu pae) depuis les origines jusqu’à la Polynésie. Ces crobars ont été acceptés d’emblée et c’est alors que la nuit venue, on pouvait voir notre ami projetant d’immenses images qu’il reprenait grossièrement au pinceau. Le lendemain, au jour, il peaufinait son dessin et le mettait en couleurs avec l’aide de quelques punis d’arrêts  et d’un vieux GMC qui lui servait d’échelle et de moyen de transport des pots de peinture.

Son immense fresque est devenue le Logo marquant le 5. Le concours du Comsites n’a eu qu’un seul concurrent : Burda et notre régiment. Notre place d’armes est devenue plus belle que jamais.

Et un jour Burda est parti rejoindre les ateliers de Képi blanc pour continuer d’illustrer, encore et encore, notre cher magazine.

Des années plus tard j’ai fait colorier de nouveau la belle fresque.

Le 5 et Burda ont disparu.

Je ne les ai plus jamais revus.

Du premier restent la gloire et le drapeau que j’ai déposé au musée, du second les dessins et l’estime de ceux qui l’ont connu.

Des vestiges de la fresque subsistent encore malgré l’abandon et les intempéries.