Notre histoire: une autre version de "Camerone":

Il est toujours intéressant de temps à autre de fréquenter la salle des archives du musée de la Légion. On y apprend énormément de choses, petits trésors cachés au fond des tiroirs ou des cartons des "dossiers et archives". Resurgissant quelques années après leur classement presque définitif, ces écrits historiques même s'ils se  ressemblent quant à la narration des évènements, sont quand même différents et attirent notre attention sur les écrits des historiens qui nous semblent trop souvent : « paroles d’évangile ». Une leçon à tirer parmi d’autres…



  "Il eut été vraiment dommage », écrit le général de Villebois-Mareuil, dans un article paru en 1896 dans  la revue des deux mondes, de priver la Légion de l’immortalité de Camerone".

De décembre 1861 à mars 1875, il n’existe plus qu’un régiment étranger. Au début de 1863, on apprend à la Légion que les « ouaves » (sauf votre respect, Président) embarquent afin d’aller faire la guerre dans l’Amérique Centrale. Grand émoi dans les mess et dans les endroits où les légionnaires se retrouvent pour boire et retrouver un peu leur passé… au fond d’un verre. La Légion n’est pas prévue pour faire partie du corps de débarquement. C’est pour l’ensemble des hommes du régiment étranger inadmissible, inimaginable. Les officiers subalternes du régiment adressèrent directement une pétition (j’imagine cela aujourd’hui !) à l’empereur Napoléon III. La Légion gagne sa cause. Il ne pouvait en être autrement, c’était encore, comme disaient les légionnaires :  "un sacré tour de ces damnés bureaux qui ne connaissent rien à la Légion". En reconnaissance, les légionnaires chantent « Eugénie » en rêvant les larmes aux yeux à la Brigitte Bardot de l’époque…

Ainsi le 28 mars 1863, le Régiment Etranger débarque à Vera-Cruz.

La puissance d’une atmosphère exotique Mexicaine agit profondément sur tous les légionnaires dont l’imagination est fertile et même pour certains… ardente. Le régiment est commandé par le colonel Jeanningros, la Légion avait la mission de la garde des terres chaudes, pernicieuse contrée qui avait pour but d’assurer les communications entre Puebla et Vera-Cruz. Ce n’était pas la plus désirable des missions.

Les terres chaudes comme leur nom l’indique est une région du Mexique couvée par un soleil infernal qui distribuait sans compter le Typhus, les fièvres et le « vomito négro ». Sous ce soleil, le paysage se transformait en un bagne incandescent, les légionnaires devaient assurer la protection des convois contre des partisans éparpillés adroitement dans ces régions hostiles et féroces.

C’est en accomplissant ce lourd travail meurtrier et quotidien que les légionnaires vont inscrire le plus beau fait d’armes de leur esprit de sacrifice : « Camerone », un nom qui sera brodé sur la soie de leurs drapeau.

Au petit matin du 30 avril 1863, la 3ème compagnie du 1er bataillon commandée par le capitaine Jean Danjou, forte de 62 hommes reçoit l’ordre de se porter au-devant d’un convoi très important qui se dirige sur Puebla. La mission est d’explorer les environs de Palo-Verde et de disperser  les guérillos qui y sont signalés. Le petit jour se lève à peine que déjà les légionnaires ont atteint le petit poste de Paso del Macho. Personne ne soupçonne que 1200 fantassins et 850 cavaliers surveillent la colonne Danjou, en profitant d'un terrain boisé pour se dissimuler.

La compagnie Danjou atteint le point d’eau de Palo Verde et met sacs à terre. Quelques sentinelles sont immédiatement placées aux points cardinaux et surveillent. Rapidement, un café obligatoirement excellent embauche. Une sentinelle appelle aux armes et se replie, on renverse les marmites. Tout à coup, la plaine se peuple de cavaliers mexicains; l’air manque autour du détachement. Du côté de Camaron, un nuage de poussière monte en trombe, le capitaine Danjou  se dirige vers ce village.

Suit le récit du déroulement du récit du combat que tous nous connaissons.

Le lendemain, un des blessés survivants est désigné par ses camarades du soin d’adresser un compte rendu du combat au colonel Jeanningros. Il écrivait : « la 3èm du 1er est morte, mon Colonel, mais elle en a fait assez pour que, en parlant d’elle, on puisse dire : elle n’avait que de bons soldats ».

Vers la fin de 1863, le régiment a perdu 11 officiers et 800 hommes sur les 1400 de son effectif. Au total la campagne du Mexique a couté au Régiment Etranger tués à l’ennemi ou morts de maladie : 31 officiers et près de 1917 sous-officiers et légionnaires. La Légion rapportait dans les plis de son drapeau la gloire de Camerone.

Le régiment rejoignit l’Algérie en 1867, il n’avait eu le temps de se reconstituer que la déclaration de guerre à l’Allemagne remettait à nouveau les légionnaires sur la brèche et les sauvait d'une dissolution programmée. Après avoir été donnée à l’Espagne et participé aux soutiens familiaux de l’empereur Napoléon III, au Mexique,  la Légion reprenait le chemin de gloire qui ne cessa d'être le sien : celui de l’honneur et de la Fidélité.

CDT (e.r.)  Christian Morisot

Publié le 10 février 2012 par légionnaires