1907 : la Légion Etrangère au Maroc.
Mars : forte du blanc-seing obtenu à Algésiras le 15 janvier 1906, et devant la recrudescence des exactions, des attaques contre ses ressortissants et des menaces à la frontière de l’Oranie et aux confins algéro-marocains, la France décide d’occuper Oujda.
En effet, la frontière algéro-marocaine est très souvent franchie par les tribus guerrières des Beni-Snassen qui pillent les tribus sédentaires d’Algérie ; l’assassinat du docteur Mauchamp le 19 mars à Marrakech provoque l’occupation d’Oujda et du territoire des Beni-Snassen, le 29 mars, par le général Louis Lyautey. Le 1er Etranger participe à cette opération.
Les Beni-Snassen, rudes montagnards au nord de la cité, s’insurgent.
Juillet : à la suite du massacre de neuf ouvriers européens du port de Casablanca, des émeutes éclatent dans la ville avec l’incursion dans la ville des tribus de la Chaouia, plaine de l’arrière-pays de Casablanca ; les légations européennes sont attaquées. C’est le feu aux poudres. Ces évènements précipitent une intervention militaire française.
Le 31 juillet, le général d’Amade, appliquant les instructions du général Louis Lyautey, décide d’occuper la Chaouïa. Les Européens, menacés se réfugient au consulat.
5 août : des marins français du Galilée, commandés par l’enseigne de vaisseau Ballande, débarquent à Casablanca, avec mission de protéger le consulat et de sauver les résidents français retranchés de leur mieux. Mais la ville est attaquée et pillée par les tribus berbères de la Chaouia. Le bombardement par la marine, pour permettre aux Européens de se dégager, est sanglant.
7 août : 3 000 hommes des troupes d’Algérie débarquent à Casablanca, sous le commandement du général Drude. La descente à terre se fait sur la plage de Sidi Belyout. Dans ce corps figure un goum algérien qui doit servir à éclairer les colonnes. Mais bien, le goum, recruté dans les Territoires du Sud, est utilisé comme un escadron de spahis.
· Parmi les unités, le 6e bataillon du 1er Etranger que rejoignent bientôt deux bataillons de marche des 1er et 2e Etrangers avec les colonels Boutegourd et Brulard.
· La présence légionnaire va s’affirmer jusqu’au départ des dernières unités en 1956.
· Sur les 116 monuments qui témoignent de la présence française au Maroc, plus de la moitié portent un nom de légionnaire ou celui d'un combat livré par la Légion.
· Casablanca devient le point de ravitaillement des troupes françaises du Maroc occidental et le centre des actions dans l’arrière-pays, notamment en Chaouïa.
· Le 6e bataillon du 1er Etranger est l’une des premières troupes qui reçoit le baptême du feu, en terre marocaine. Son premier travail est de nettoyer la ville livrée au carnage et au pillage. Les légionnaires forcent les portes de France et de la Marine, dégagent les carrefours, chassent les pillards. Le soir, le drapeau tricolore flotte sur Casablanca, petite cité de 15 000 habitants. Les légionnaires du 1er Etranger commencent brillamment leur campagne.
· L’incursion des tribus laisse des traces sanglantes, surtout dans le mellah, le quartier juif. 200 victimes sont dénombrées. Plus de 250 femmes et enfants ont été enlevés.
25 août 1907 : le groupement du commandant Provost repousse une violente attaque près de Casablanca. Les combats devant Casablanca sont très meurtriers.
3 septembre : alors que son bataillon est l’avant-garde d’une colonne qui cherche à surprendre les campements ennemis installés à Taddert, le commandant Marie Provost trouve la mort à la tête de ses légionnaires au cours d’un combat sanglant. Mais son bataillon inflige aux Marocains de lourdes pertes.
Le 17 septembre, la Légion Etrangère perd à Casablanca un officier, Pillot.
Septembre 1907 : avec maîtrise, le général Louis Lyautey lance une opération vers les Beni-Snassen révoltés pour les amener à capituler. La Légion Etrangère et les Tirailleurs algériens participent à l’opération. Bou Denib, siège de la tribu, est occupée et la tribu demande l’aman. Le général vient de s’assurer de la soumission des Beni-Snassen.
Le 19 octobre, le 1er Régiment de Chasseurs d’Afrique perd le capitaine Charles Ihler, commandant le 2e escadron, lors d’une charge aux portes de Casablanca.
Décembre 1907 : le 1er Bataillon du 1er Etranger participe à la prise du Marabout de Sidi-Bou-Tchich et à l’implantation du camp d’Aïn-Sfa.
Jean Balazuc P.P.P.P.
Bibliographie.
L’Algérie, œuvre française de Pierre Goinard – Robert Laffont – 1984.
Histoire de la France en Algérie de Pierre Laffont – Plon – 1980.
La Légion Etrangère, le 150e anniversaire – Historia N° spécial du 2e trimestre 1981.
La Légion, Grandeur et Servitude – Historama N° spécial de novembre 1967.
France Horizon, bulletin de l’ANFANOMA.
Histoire de l’Afrique du Nord du général Edmond Jouhaud – Edition des 2 Coqs d’or – 1968.
Le 1er Etranger de Philippe Cart-Tanneur et Tibor Szecsko – Branding Iron Production – 1986
Le 4e Etranger de Philippe Cart-Tanneur et Tibor Szecsko – Branding Iron Production – 1987.
Français par le sang versé – Képi Blanc E.C.P.A.D. – Editions du Côteau – 2011.
d’Amade Gérard, né le 24.12.1856 à Toulouse ; saint-cyrien en 1874-1876 ; sous-lieutenant au 3e R.T.A. à Constantine de 1876 à 1881 ; affecté au Tonkin en avril 1885 ; colonel, chef de corps du 71e R.I. en 1904-1906 : général au Maroc ; appliquant les instructions du général Louis Lyautey, il occupe la Chaouïa en 1907 ; en 1908, il commande le corps de débarquement au Maroc ; à la tête de la colonne du littoral, il mène une campagne vigoureuse et victorieuse ; le 01.11.1858, avec l’autorisation du général Louis Lyautey, il signe l’ordre N°100 organisant les goums marocains dans la Chaouïa. Commandant du Corps expéditionnaire d’Orient du 24 février au 14 mai 1915 : malade il rentre en France. Décédé le 11 novembre1941 à Fronsac en Gironde.
Ballande, enseigne de vaisseau ; l’intervention de sa compagnie de débarquement à Casablanca le 05.08.1906 sauve de nombreux Européens.
Boutegourd René Auguste Emile, né le 20.09.1858 à Lambezella dans le Finistère ; saint-cyrien de la promotion 1877-1879 ; lieutenant-colonel en 1900, affecté au 1er R.T.A. ; colonel, chef de corps du 1er Régiment étranger de 1904 à 1907 ; à Casablanca en 1907 ; général de brigade le 20.03.1914, inspecteur de la 1ère Région ; affecté le 02.08.1914 à la 51e F.I. ; décédé le 06.03.1932 à Brest.
Brulard Jean-Marie, lieutenant-colonel, chef de corps du 1er Régiment de marche du 2e Etranger, au Maroc en 1907 ; chef de corps du 2e Etranger de 1908 à 1911. Général de division ; il participe brillamment à l’expédition des Dardanelles.
Drude Antoine Marius Benoît, né en 1853 ; capitaine, commandant une des compagnies de la Légion Etrangère au Dahomey en 1892 ; chef de bataillon, commandant un groupe au Dahomey en 1893 ; lieutenant-colonel, il participe à l’expédition internationale en Chine en 1900-1901 ; le 07.11.1900, il s’empare de Kao Pay, à la tête de ses trois compagnies d’infanterie et d’une section d’artillerie de campagne ; général de brigade, commandant les troupes d’Algérie débarquant au Maroc le 07.08.1907. Général de division en 1911. En 1914, il commande la division d’Oran. Grand-Officier de la Légion d’honneur. Décédé en 1943.
Ihler Charles Gustave Adolphe, né le 05.06.1868 à Thann ; saint-cyrien de la promotion 1887-1889 ; Ecole de cavalerie de Saumur ; affecté au 20e Dragons à Lille ; capitaine instructeur au 1er Chasseurs d’Afrique à Blida le 15.07.1903 ; volontaire pour la Maroc ; tué lors d’une charge de cavalerie à la tête du 2e escadron du 1er Régiment de Chasseurs d’Afrique, le 19.10.1907, aux portes de Casablanca.
Lyautey Louis Hubert, né à Nancy le 17.11.1854 ; major de sa promotion de Saint-Cyr Archiduc Albert 1873-1875 ; en Indochine en 1894 ; collaborateur du Maréchal Joseph Galliéni au Tonkin en 1894-1897 et à Madagascar en 1897-1902 ; nommé en 1903 commandant de la subdivision d’Aïn-Sefra ; commandant de la division d’Oran en mars 1907 ; il occupe Oujda en mars 1907 ; il crée le protectorat français au Maroc dont il est le premier Résident Général du 23.04.1912 à 1916 ; par son ascendant et ses relations personnelles, il obtient des forces militaires et pacifie le pays sans même s’en servir ; il respecte les coutumes et la religion du Maroc ; ce royaliste sans roi se crée un royaume au Maroc et l’offre à la République ; ministre de la Guerre en 1916-1917 ; élevé à la dignité de Maréchal de France en 1921 ; il intervient de nouveau au Maroc pour la guerre du Rif de 1921 à 1925 ; il entre à l’Académie Française (livres : ‘’Le rôle social de l’officier’’ et ‘’Lettres du Tonkin et de Madagascar’’) ; président d’honneur de l’exposition coloniale de 1931 à Vincennes ; parrain de la promotion 1935-1937 de Saint-Cyr ; mort le 27.07.1934 à Thorey.
Pillot, officier de la Légion Etrangère, tué au combat à Casablanca au Maroc, le 17.09.1907.
Provost Marie Alexis, commandant du 6e Bataillon du 1er Etranger ; il trouve la mort à la tête de ses légionnaires à El-Hadj-Bouazza-Ben-Missiki dans la région de Taddert au Maroc le 03.09.1907.