Il est curieux que la France ait toléré l’existence d’un corps plaçant la fidélité au dessus de celle qu’il devait au pays et dont la devise : « Legio Patria Nostra » est une déclaration de demi-allégeance.
Cet état de chose à cependant permis d’attirer des officiers et des hommes plus ou moins hostiles à la France républicaine.
Le général Rollet en développant voire en créant les traditions a provoqué l’isolement, le sentiment d’autosuffisance de la Légion pour glorification de ses mythes.
Ainsi, trop attaché à sa géographie morale, la Légion s’est faite prisonnière de ses propres contradictions et doit garder en mémoire que son rôle principal est de seulement mettre en œuvre la politique décidée par le gouvernement. Sa mission fût-elle déplaisante, elle reste toujours comme le dit si bien le légionnaire Flutsch (dont le livre était offert au jeune officier affecté à la Légion): "le monastère des incroyants".
L’imagerie populaire de la Légion repose sur l’esprit de Camerone qui précise, exemple à l’appui, que le légionnaire reste toujours fidèle à la parole donnée et que de ce fait, la mission, il l’accomplira jusqu’au bout faut-il pour y parvenir, mourir.
C’est cette maxime qui donne à notre Institution légionnaire un panache exceptionnel et qui a pesé en sa faveur lorsque son existence était menacée.
Il est tellement vrai que si la Légion est parvenue à s’imposer française, c'est aux préjugés et à la vanité des Français qu'elle le doit tant ils lui accordent une réelle admiration qu'alimentent des liens très forts où se mélangent les sentiments les plus divers, de la fierté au mythe, mais aussi par la conviction d’exposer aux yeux du monde l’exemple indiscutable d’une intégration réussie de cet étranger devenu fils du pays des droits de l’homme et du devoir du citoyen, non "par le sang reçu mais par le sang versé".
Camerone, la main du capitaine Jean Danjou représentation fétiche de la parole donnée; devant un tel symbole, la Légion ne peut que perdurer avec cet état d’esprit depuis longtemps disparus des armées des nations. La Légion est bien vivante et a de l’allure. Le musée des gloires passées où dans la crypte à Aubagne repose la main articulée du capitaine Jean Danjou incarne un besoin essentiel de l’âme légionnaire: « celui de pouvoir recommencer une vie brisée où est possible une forme de rédemption par le danger et la souffrance ».
La Légion, n’en doutons pas, aura encore de belles pages d'Histoire à écrire pour un avenir aussi brillant que celui de son passé, mais elle ne sera jamais une arme incontrôlable.
En ce 11 novembre, forts de l’adage qui veut que sur « la terre imprégnée du sang des légionnaires, le soleil ne se couche jamais », nous aurons une pensée respectueuse pour nos anciens morts au service de la France: " Et pour notre France chérie, tous ces étrangers, bravement, viennent défendre la Patrie, avec honneur et dévouement*".
CM
* Extrait du chant de la 13: "Sous le soleil brûlant d'Afrique".