Le coran de l’Aumônier :
Le groupement mobile auquel appartenait le 3ème Régiment de Légion était utilisé pour venir en aide aux secteurs particulièrement en danger. D’où une mobilité permanente. De ce fait, nous étions en compagnie des unités les plus diverses. Ce qui nous mettait en contact souvent avec des Africains, Tunisiens, Marocains, Algériens. Que faire lorsque, dans ces troupes, des hommes étaient blessés, parfois mourants ? Je me sentais démuni. C’est pourquoi j’ai demandé à l’un d’entre eux de me choisir les plus beaux versets du Coran pour les apprendre par cœur et aider au grand passage ces hommes musulmans. L’apprentissage fut long. Ce n’est pas rien d’apprendre par cœur 15 ou 20 versets, de mettre en place l’accentuation et de ne pas faire de fausse interprétation. Néanmoins, après quelques mois, ce fut chose faite. Et ce fut un grand réconfort que de passer prfois beaucoup de temps auprès d’un de ces hommes gravement blessé. Il y avait en eux un certain fatalisme. 3Mektoub", »'est écrit… Ils acceptaient la mort qui venait avec une certaine paix. Et je pense les avoir aidés dans ce passage en répétant lentement les versets du texte sacré. Ne sommes-nous pas tous les enfants d’Abraham, le père des croyants ?
La Messe en zone Viêt :
Lors d’une opération, la compagnie que je suivais avait pénétré en zone Viêt-minh et nous avions fait la découverte d’un village catholique, abandonné, dont les habitants n’avaient pas vu de prêtre depuis plus de trois ans. J’en avais té profondément ému. Je ne pouvais me résigner à les laisser ainsi. J’en parlai au colonel, un vieux de la Légion où il avait passé 25 ans. Il me comprit, mais exigea que soient prises les plus grandes précautions.
C’est ainsi que, quelques jours plus tard, je partis avec 35 légionnaires pour ce village dont les habitants furent rapidement prévenus. J’avais exigé que les légionnaires qui surveillaient l’intérieur de l’église cachent leurs armes, tandis que les autres encadraient l’église et les alentours.
Sur l’autel, sans messe depuis tant de temps, je déposai ma chapelle portative sur une mélodie monotone, alors que l’église se remplissait de Vietnamiens, plus de 300.
Le messe débuta dans une langue qu’ils ne comprenaient pas. Mais les objets du culte et les gestes du prêtre étaient bien connus d’eux. Ils commencèrent, sur une mélodie monotone, la psalmodie qu’ils connaissaient par cœur et dont les termes commencaient le déroulement de l’Eucharistie.
Au moment de la communion, une cinquantaine de Vietnamiens s’approchèrent de l’autel.
La mese achevée, je saluai respectueusement les chefs de village et nous sommes repartis sans qu’aucune attaque ne soit venue interrompre l’office.
Que sont-ils devenus ces paysans isolés ? Je ne le sais. Mais ils ont certainement tenu bon etconstituent aujourd’hui, eux, leurs enfants et petits-enfants, le peuple qui obtient péniblement, en régime communiste, quelque allégement malgré les contraintes du parti.
La preuve en est cette retraite pour des séminaristes dont me parlait un jésuite. Il soulignait les ruses dont les chrétiens du Viêt-nam sont capables de faire preuve pour vivre leur foi sans donner lieu à persécutions.
Just de Vesvrotte
Demain : « L’Autel du Luthérien :