Huile sur toile de Pyc - collection Jouanic.
"Baptême du feu" pour la Légion à Maison Carrée en 1832, dans le Nord de l'Afrique avant que cette possession française ne prenne en octobre 1839 l'appellation: "Algérie"
La fidélité mérite une réflexion et un partage.
"Semper fidelis" (toujours fidèle), chacun à sa formule sur ce sujet au point, pour certains penseurs avertis, qu'ils puissent dire sans sourciller, qu’il n’y aurait pas d’honneur sans fidélité, hélas, mon bon monsieur, la réalité est toute autre…
Quand une analyse ou une affirmation sans concession s'affiche, trop souvent il est possible sans trop de recherches de présenter tout et son contraire…
De ce fait, il est très délicat d’écrire un éditorial, une préface ou encore un avant-propos en affirmant détenir la seule vérité dans ce qui est écrits.
AM, nous apporte sa version concernant sa vision de la fidélité ; son article est plein de bons sens, il ne saurait laisser indifférent et s’avère passionnant, c’est un vrai sujet de débat, en particulier la conclusion : « La fidélité est donc bien cet attachement qui volontairement vous lie à vos Chefs et à travers eux, à la Légion. »
Très bonne lecture !
CM
De la Fidélité…
« La fidélité ne s 'affirme vraiment que là où elle défie l'absence. »
Fidélité est un mot ambigu aux définitions diverses ! Quelle qu’elle soit, la fidélité suppose toujours – à tort selon nous - une notion de soumission par l’attachement à quelqu’un, à quelque chose, à des principes…
Depuis la nuit des temps l’individu est fidèle à son pays, à son roi, à sa foi.
On ne manque pas d’exemples fictifs de ce que la fidélité exerce un rôle fondamental dans la détermination des actions morales. La littérature semble être le lieu où le destin des personnages est modifié par cette valeur. Ainsi Antigone (Sophocle) peut être considérée comme une des plus importantes œuvres de fiction qui traitent de la valeur morale de la fidélité. La fidélité d’Antigone à son frère et à la tradition de la cité, même si cela comporte la désobéissance aux ordres du tyran Créonte mettant ainsi en péril sa propre vie et celle de sa sœur. Rodrigue (Le Cid – Corneille) par fidélité à son honneur tue le père de son aimée, créant ainsi de sa part une haine profonde à son encontre…
Dans la réalité un exemple représentatif est sans doute celui de Socrate qui est mort par fidélité à sa conscience et aux lois qu’il avait lui-même aidé à élaborer.
Le mot fidélité est employé en situations diverses et peut être utilisé par rapport à des idées ou à des personnes. L’acte fidèle a un poids différent s’il s’agit d’une action routinière ou sporadique ou, au contraire, d’une action obligatoire ou exécutée volontairement. Mais toutes ont des éléments en commun. Le premier vient de la croyance en quelque chose aimée. Il n’est possible d’être fidèle que si le sujet est convaincu de la validité de l’objet aimé.
La fidélité suppose la présence d’une foi dans l’immutabilité des idées et des personnes. Il serait inconcevable que quelqu’un puisse croire en une chose frivole, inconstante. Comment être fidèle à quelque chose, à quelqu’un dont on sait que cela peut changer du jour au lendemain ? La fidélité comporte donc la notion de fiabilité. Tout comme il ne saurait y avoir de fidélité sans mémoire. Ainsi, être fidèle c’est se souvenir de certaines idées que l’on aimerait inaltérables.
La fidélité a un objet : faire venir quelque chose à la mémoire pour que la chose ne change pas. Cela ne signifie pas que les objets de la fidélité ne puissent pas être soumis à critiques, discussions ou réflexions et, devant des évidences ou arguments solides, modifiés. On pourrait affirmer que la fidélité résiste à l’abandon, à tout moment, de valeurs considérées comme chères.
A la Légion la fidélité est partie intégrante de l’état légionnaire. Les drapeaux de cette vieille et noble institution ne peuvent contenir la devise générale des drapeaux du reste de l’armée française, « Honneur et Patrie » ! Dans ce cas « Patrie » ne pouvait être remplacée que par « Fidélité ». Cette règle commune était celle du régiment suisse de Diesbach (1639-1792). Composée d’étrangers à qui la France a confié ses armes, la patrie charnelle ne peut donc être évoquée - d’où l’autre devise Legio Patria Nostra.
Bien avant que « Honneur et Fidélité » ne figure sur les drapeaux des régiments étrangers, ce qui allait devenir une devise, figurait déjà sur le contrat d’engagement des légionnaires dès le 19e siècle, qui déclaraient par leur signature de servir ainsi la France. C’est le lieutenant-colonel Rollet qui, aux lendemains de la Grande Guerre a obtenu du Ministre des Armées que cette devise figure sur nos drapeaux.
La fidélité présuppose que les participants de l’accord soient libres d’opter d’être fidèles. Différemment de l’obéissance à l’autorité, la fidélité exige que l’acte fidèle soit la conséquence d’un libre choix.
Par ailleurs, et c’est à nos yeux un « détail » d’une notable importance, la fidélité implique, implicitement, un échange et, par conséquent, l’Autre. Elle n’est possible qu’en relations interpersonnelles avec d’autres individus, institutions et même avec la société. L’existence de la fidélité n’a de sens que si elle est assise sur ce principe. Or, malheureusement, certains considèrent la fidélité comme un attachement ascendant, comme une soumission, et jamais descendant, comme un privilège !
L’un de nos chefs qui a toujours fait de la fidélité un attachement à double sens, nous disait qu’un légionnaire n’est pas un matricule mais un compagnon d’armes. C’est ainsi que la fidélité peut naître et perdurer entre les individus et entre ceux-ci et l’institution légionnaire, car sans légionnaires point de Légion !
Il y a quelques années un de nos généraux en retraite a été publiquement et par écrit, ignominieusement attaqué par un autre général apparatchik, qui accusait aussi d’autres chefs Légion d’une sorte de népotisme pour imposer la grenade à sept flammes dans les allées du pouvoir… bien que non aimé du général en retraite nous avons publié une virulente critique à l’endroit de l’apparatchik malgré notre importante différence de grades et ce au nom de la fidélité !
Voici quelque temps dans un article publié dans Képi Blanc, nous avons dénoncé le fait que des officiers de la plus haute valeur morale, militaire et patriotique aient pu engager dans une lutte qui leur était propre, des légionnaires, leurs subordonnés, dans un combat sans lendemain alors qu’ils avaient engagé leur parole de servir la France, rien d’autre que la France à travers la Légion. Ces légionnaires ont suivi leurs chefs par fidélité, non à la parole donnée mais à leurs chefs parce qu’ils les aimaient.
La fidélité est donc bien cet attachement qui volontairement vous lie à une idée, une foi, des individus, des institutions que le fidèle estime mériter d’être aimés.
C’est pourquoi, peut-être, les légionnaires sont fidèles à leurs chefs, à leurs camarades, à la Légion, à la France et ce bien au-delà du temps du service actif, dans la société qui les environne, au sein des amicales, et sur les réseaux sociaux maintenant car « Légionnaire un jour, légionnaire toujours ».
AM