Insolence...

Quand un ancien légionnaire diminué par les coups que lui ont porté les meurtrissures de la vie, devient insolent au point de braver des reproches mérités, alors, alors il reprend goût à lutter, à vivre.
Entre humour et tendresse, le léger et le grave, l'insolence inattendue de mes légionnaires, en Guyane, m'avait comblé d'aise. Attitude insaisissable de personnages habituellement discrets, habitués à être rejetés, qui se remettent brusquement à revivre par on ne sait quel miracle:


L'être humain, ce n’est pas une découverte, possède des ressources inimaginables qui permettent d’espérer pouvoir le sortir de situations, des plus minables aux plus inquiétantes. Comme il est bon et réconfortant pour nous de pouvoir dire que nous ne saurions laisser un pensionnaire dans sa solitude misanthropique, sachant les dégâts provoqués par cet état de déprime. Conscients de cette situation, nous avons imaginé, à la manière de nos anciens, « More majorum », passer la première herse, franchir le fossé d'enceinte et nous glisser dans la place forte, là, précisément où se cachent les idées reçues, les préjugés et les résistances inconscientes.
C'était, au départ, un appel à la lucidité, à la raison. Petit à petit, notre ancien revivait, il ne pensait même plus à manifester de l'animosité, les enjoués ne l’agaçaient plus, il se sentait suffisamment important et se surprenait à débattre des vraies difficultés de l'existence. Il devenait à nouveau, intéressé et responsable, les contraintes étaient prises à bras le corps comme il se doit, avec conscience et entrain.
Prise de conscience donc de cet ancien et de tant d’autres, une nouvelle et belle aventure qu'il leur faut entamer  et tout commence réellement par un électrochoc, celui pour nous, d'être capables de leur dire sans inutiles précautions ni timidité mal placée : « qu'ils doivent changer de vie et de comportement!».
Dans nos 2 maisons d'hébergement des Anciens légionnaires, Ermitage entouré, noyé dans un écrin de verdure, bu par la tendresse pervenche fanée du ciel provençal ; parfois c'est tellement beau que nous en avons un peu honte. Il faut nous dépêcher de l'offrir en partage à nos camarades isolés, pour qu'ils deviennent à leur tour insolents, afin qu'ils renoncent aux regrets, aux frustrations amères, aux : « si j'avais su, si j'avais pu, si l'on m'avait aidé, poussé, conseillé, aimé ! », pour qu’ils revivent en somme.
Viens donc chez toi, monsieur ancien légionnaire, au domaine de Vède ou à l'Institution des Invalides à Puyloubier et tourne le dos à tous les rongeurs de joie, à tous ces empêcheurs de bonheur, accueille à plein visage et à pleins poumons le soleil et l’air d’ici, une fois la porte franchie.

CM