Amicale Vert et Rouge.

 Précisions de Marie Larroumet:

"Je prépare depuis quelques semaines un article de fond sur l’histoire des inscriptions des noms de batailles sur les drapeaux de la Légion étrangère avant 1885.

Pourquoi cette date ? Ma curiosité me pousse plutôt à m’intéresser aux emblèmes antérieurs à ceux actuellement en vigueur dans nos armées, le modèle dit « modèle 1880 », dont les premiers furent remis par le Président de la République, Jules Grévy (1807-1891), le 14 juillet 1880. D’autre part, je souhaitais travailler sur les années qui précèdent la recréation définitive des deux plus anciens régiments de la Légion étrangère, le 1^er et le 2^e Régiments Etrangers qui furent recréés le 1^er avril 1885. Et puis, l’envie me taraudait de savoir depuis quelle date l’inscription « Camerone » était peinte sur les drapeaux des régiments étrangers !

Je pensais vous proposer cet article pour Camerone mais les recherches s’avèrent extrêmement complexes. Comme il est certain qu’il me faudra du temps pour terminer ce travail, en voici un extrait : celui qui se rapproche le plus du 30 avril !":

C’est par l’Ordonnance du 10 mars 1831 que Louis-Philippe (1773-1850) créa la Légion étrangère. A l’origine composée d’un unique régiment, elle fut, le 1^er avril 1841, dédoublée en deux régiments, le 1^er et le 2^e Régiments Etrangers qui, après avoir intégré dans leurs rangs ce que les historiens appellent la 2^e Légion – unité uniquement composée de Suisses formée le 17 janvier 1855 et dissoute le 16 avril 1856 par l’Empereur Napoléon III (1808-1873) pour participer à la guerre de Crimée (guerre menée, entre 1853 et 1856, par une coalition à laquelle appartenait la France contre la Russie pour limiter l’expansionnisme russe dans cette région) –, le 1^er et le 2^e RE fusionnèrent à nouveau, le 1^er janvier 1862, en un régiment étranger : celui qui partit pour le Mexique et s’illustra à Camerone !

Lorsque le 1^er Régiment Etranger fut licencié – Napoléon III choisit de le licencier plutôt que le 2^e Régiment Etranger car il avait hérité des traditions et des derniers personnels de la 2^e Légion tandis que le 2^e Régiment Etranger était uniquement composé de légionnaires de la 1ere Légion (non suisse) –, le 2^e Régiment Etranger devint Régiment Etranger. L’emblème du 1er Régiment Etranger fut reversé à la direction de l’artillerie d’Oran puis au musée de l’artillerie à Paris tandis que celui du 2^e Régiment Etranger, préalablement transformé, aurait dû revenir au Régiment Etranger, récupération qui s’avéra finalement impossible ce qui entraina la fabrication d’un nouveau drapeau.

C’est cet emblème qui partit pour le Mexique avec le Régiment Etranger et c’est lui qui, semble-t-il, le premier, reçut l’inscription « Camerone » dans ses plis.

Inscription « CAMERONE 1863 » sur le drapeau d’un régiment

Par courrier en date du 4 octobre 1863, soit moins de six mois après le combat – vous ferai-je l’affront de vous rappeler que le combat de Camerone eut lieu le 30 avril 1863 ! –, le Chef de Corps du Régiment Etranger demanda au Ministre de la Guerre que l’inscription « Camerone » soit inscrite sur le revers du drapeau du régiment ainsi que sur la médaille du Mexique.

Par l’ordre du régiment n°14 du 25 janvier 1864, le Maréchal de France Ministre Secrétaire d’Etat de la Guerre Landon, accéda à la première demande et refusa la seconde.

                        La médaille du Mexique (1862-1863)                     

C’est probablement en faisant référence à son article 2 que le Chef de Corps du Régiment Etranger demanda à ce que l’inscription « Camerone » soit inscrite sur cette médaille. Cet article stipule en effet que cette « médaille sera en argent et du module de trente millimètres. Elle portera, d'un côté, l'effigie de l'Empereur avec ces mots : « Napoléon III, Empereur » et de l’autre côté, en légende : « expédition du Mexique 1862-1863 » et en inscription les noms « Cumbres, Serro-Borrego, San-Lorenzo, Puebla, Mexico ». Ce médaillon sera encadré des deux côtés par une couronne de laurier. » Cette médaille est suspendue à un ruban blanc de 36 mm. Portant un dessin très original, œuvre de Désiré Albert Barre, graveur général de la Monnaie de Paris, représentant les armes de la République du Mexique inspirées de la symbolique aztèque, à savoir une bande rouge et une bande verte de 5 mm. Placées en diagonale et formant une croix au milieu de laquelle vient se superposer un aigle noir aux ailes déployées tenant un serpent vert par le bec et les serres. Quelle ressemblance avec l’insigne du 1^er Régiment Etranger d’infanterie – insigne homologué sous le n°G.1198 le 26/09/1955 –

Insigne du 1^er RE

Par la suite, l’inscription « Camerone », suivie ou non du millésime « 1863 », fut inscrite sur les emblèmes règlementaires des régiments de la Légion étrangère au fur et à mesure de  leur création avant qu’il soit décidé, le 3 février 1934, de l’y peindre systématiquement, voire quelques années plus tard, lorsque cette dernière fut oubliée comme ce fut le cas pour le drapeau du 11^e Régiment Etranger d’Infanterie – le 11^e REI fut créé en novembre 1939 alors que la France et l’Angleterre venaient de déclarer la guerre à l’Allemagne (3 septembre 1939) après qu’elle eut envahie la Pologne (2 septembre 1939) et dissout à l’issue de la bataille de France (10 mai-25 juin 1940) durant laquelle il s’illustra brillamment - sur lequel « Camerone 1863 » ne fut inscrite que lorsqu’on le ré-confectionna pour le confier à la garde du Groupement de Recrutement de la Légion Etrangère (GRLE) en 2018.

Remarques :

• L’utilisation de millésimes, à savoir l’inscription de dates derrière les noms de batailles, date de la Première Guerre mondiale (1914-1918). Il n’y en avait donc pas sur les emblèmes du XIXe siècle, quoique les archives en ce domaine ne soient pas toujours concordantes.
• Entre 1871 et 1880, après que les emblèmes du Second Empire (1852-1870) dans l’urgence furent détruits, comme souvent après chaque changement de régime, et avant la remise des emblèmes « modèles 1880 », le Chef de Corps du Régiment Etranger fit fabriquer de manière artisanale un drapeau sur lequel seule apparaissait la dénomination de son régiment.

Bon Camerone à tous !

Amitiés légionnaires.

Vert & Rouge Info

Rédaction de ce bulletin : Lieutenant-Colonel (RC) Bérengère Nail