L’épopée du sergent BERSET en Espagne et en Afrique
Le 24 mars 1836, trois bataillons carlistes qui avaient quitté leurs cantonnements pour essayer de désarmer la vallée d’ERRO, soulevée en faveur de la Reine, étaient en marche pour regagner leur ligne de la vallée de LANZ. Le général BERNELLE qui occupait avec les bataillons de la Légion étrangère les villages de la vallée de l’ARGA essaya de leurs couper le passage qu’ils ne pouvaient opérer que par deux points bien connus.
Le lieutenant-colonel MAGNIER reçoit l’ordre de quitter le village de ZUBIRI à la pointe du jour, de gravir les hauteurs et de rester à La Borda de INIGO. Si l’ennemi se présente, et qu’il puisse être arrêté une heure, le général, qui garde l’autre défilé, arrivera à son secours, et l’ennemi sera rejeté sur le vice-roi de NAVARRE, qui est à sa poursuite avec deux bataillons de la garde royale espagnole.
Le lieutenant-colonel MAGNIER exécute une partie de l’ordre. Il attend quelques instants à La Borda de INIGO, mais n’apercevant dans la vallée d’ERRO aucune troupe en marche, il se prolonge sur les crêtes et s’éloigne d’une lieue du point indiqué. Après une heure de marche, il cherche à regagner La Borda. Le temps est affreux, un déluge de grêle et de neige fondue aveugle les soldats qui marchent avec difficulté sur une crête glissante, l’arme sous le bras gauche.
Mais pendant qu’ils s’éloignaient de La Borda, l’ennemi y arrivait. A leur retour, au moment où ils s’y attendaient le moins, les voltigeurs du bataillon qui faisaient l’avant-garde sont tout à coup salués sur leur gauche par un feu de bataillon et chargés ensuite par un escadron de lanciers navarrais. Avant que le bataillon ait pu arriver à leur secours, vu ses mauvaises dispositions, la première section est entourée et presque sabrée entièrement.
Un sergent nommé BERSET fait une résistance héroïque : d’un coup de feu, il abat le commandant de la cavalerie, le fameux EL ROJO. Il se défend en désespéré, à coups de baïonnette contre les cavaliers qui le hachent à coups de sabres, le percent de leurs lances. Il était encore debout quand le bataillon, revenu de sa surprise, arriva pour le dégager. BERSET avait reçu vingt-deux blessures.
Il ne resta que peu de mois à l’hôpital et retourna à son bataillon avec la croix de Saint-Ferdinand de 1ère classe et l’épaulette de sous-lieutenant.
Au 15 septembre 1836, il se distingua de nouveau au combat d’ARRONIZ, livré par le général LEBEAU, commandant la division auxiliaire française à l’armée navarraise, et il fut décoré une seconde fois de la croix de Saint-Ferdinand.
Après la dissolution de la Légion étrangère, BERSET revint en Afrique pour s’engager dans la nouvelle Légion étrangère. Il reprit les galons de sergent, le Gouvernement français n’ayant voulu reconnaitre aucun des grades acquis en Espagne, et il dut travailler encore péniblement pour reconquérir son épaulette de sous-lieutenant qui ne lui fut rendue que le 19 février 1843.Il avait été décoré de la Légion d’honneur le 17 mai 1838 à la prise de DJIDJELLI.
Quelques mois après, la colonne de Mr. Le général BOURJOLLY traversait le pays des Matmatas, son arrière-garde était vivement suivie par les Arabes. La compagnie de la Légion où BERSET était sous-lieutenant, fut obligée plusieurs fois de faire des retours offensifs. Comme toujours, un fusil à la main, on vit BERSET électriser ses soldats et se ruer à leur tête sur les masses arabes qui abandonnèrent enfin leur poursuite. Mais ses jours étaient comptés. Il fut atteint d’une balle et termina ainsi sur le champ d’honneur, par une mort glorieuse, une vie toute entière consacrée au service de la France.
Sources : livre de Paul AZAN, « La Légion étrangère en Espagne, 1835-1839 »pages 636, 637, 638.
NB : Pendant la campagne d’Espagne, les différents grades étaient à titre espagnol.
Général Paul Azan.