CAMERONE: J-4 !
Le 26 octobre 1962, le drapeau du 1er RE entrait majestueusement au camp de "la demande", futur quartier "Viénot" à Aubagne. Deux mois après, paraissait les trois tomes de "C'est la Légion" écrits en commun par le général Louis Gaultier, ancien président de la FSALE et le colonel Charles Jacquot, bienfaiteur de la "Maison du légionnaire" à Auriol.
Avant ce Camerone particulier qui se prépare, nous vous proposons quelques extraits de cette édition en 3 volumes (tome 1: les temps passés / tome 2: Les temps modernes / tome 3: Legio Patria Nostra. Un vrai concurrent méconnu de notre "livre d'or"...
Ces deux auteurs ne se dissimulent pas, leurs écrits racontent avec le même vocabulaire, les mêmes idéaux forgés jour après jour dans le même milieu: le légionnaire et la Légion en 1963.
Question: "pourrait-on encore affirmer aujourd'hui les mêmes écrits ?"
Bonne lecture !
« La Légion a survécu à tous les changements, aux bouleversements, aux défaites même, grâce à son idéal basé sur les valeurs fondamentales que notre monde renie actuellement, ce qui à notre sens, doit le conduire inéluctablement à sa perte, s’il ne se ressaisit pas à temps. L’idéal proposé au légionnaire est le sacrifice d’où naît le dynamisme ; le monde moderne prône la facilité qui conduit à la passivité. Il est impensable que celle-ci ne sorte pas battue de la confrontation.
Rien de ce qu’entreprend la Légion étrangère n’est banal. Lorsqu’elle plante aux coins d’un espace livré à son action ses quatre fanions : honneur, fidélité, valeur et discipline, elle prend l’engagement que rien de ce qui se passera désormais dans ce champ clos ne sera méprisable.
Il est de bon ton dans certains milieux d’attaquer la Légion, avec ou sans connaissance du sujet, avec ou sans mauvaise foi. On veut bien la reconnaître comme la première troupe du monde mais cette primauté est traitée par le mépris au nom d’une fausse idée de progrès et de civilisations. De plus, toutes les occasions sont bonnes pour dépeindre le légionnaire comme un être absolument révoltant car le légionnaire vaut infiniment mieux que l’homme moyen de son époque.
Les légionnaires se recrutent dans le monde entier et il y a de tout parmi eux:
- - Ceux qui sont épris d’aventures ; (ce sont les meilleurs surtout quand ils ont la vocation militaire ce qui est assez),
- - Les meurtris de la vie ; (leur gamme est étendue mais la moyenne est correcte),
- - Les hésitants, les maladroits, (eux aussi très variés, mais la moyenne est déjà moins bonne),
- - Les chômeurs (dont une part seulement parvient à s’affirmer),
- - Les clochards, les vicieux, les chevaux de retour (qui constituent le rebut et qui, se découragent souvent et très vite).
Ce qui compte pour tous ces engagés c’est la période de formation pendant laquelle la sélection, physique et morale, s’opère. Cette formation se fait avec une rigueur monastique et dans un climat de sévérité qui lui confère une extraordinaire puissance d’imprégnation.
Il est admis généralement qu’une troupe vaut par ses cadres. C’est peut-être moins vrai qu’ailleurs à la Légion où les fortes natures ne manquent pas et où lorsque, hélas trop fréquemment, l’infortune du combat l’exige, il y a toujours un homme dans le rang pour remplacer le chef disparu. Mais il y a un moment où les cadres sont indispensables: c’est l’époque de la formation lorsque se crée le légionnaire. Le terrain d’élection des cadres de la Légion ce sont donc les unités d’instruction. Et, sans diminuer le rôle des officiers dans ce domaine, rendons aux sous-officiers de la Légion l’hommage qui leur est dû. Instructeurs, ils sont les instituteurs des engagés, leur apprenant à penser, à lire, à écrire légionnaire ; ils les malaxent comme ils l’ont été eux-mêmes ; procédés traditionnels et éprouvés, impératifs indiscutés, mysticisme, déification, tout le grand jeu de la Légion va jour après jour façonner le légionnaire.
Chevilles ouvrières de ce noviciat les sous-officiers sont également les plus sûrs gardiens de la tradition et c’est essentiellement grâce à eux que s’adaptent les nouveaux officiers.
Il y aura 100 ans, le 30 avril 1863, qu’une poignée d’hommes, privés de boissons et de nourriture, très rationnés en cartouches, tint tête toute une journée de chaleur tropicale à deux mille combattants mexicains qui l’encerclaient et faisaient appel à toutes leurs notoires qualités de courage pour briser cette résistance à laquelle, le combat terminé, ils rendirent un chevaleresque hommage mais qui, dans le feu de l’action, les humiliait, les exaspérait du fait de la disproportion des forces opposés.
Le choix de Camerone comme fête légionnaire, n’a jamais été remis en question. Et pourtant, depuis 1863 que de victoires, que de faits d’armes plus renommés, plus lourds en pertes, plus retentissants, plus influents sur le cours de l’histoire. De Camerone montent une poésie spéciale, une atmosphère difficile à recréer, le sens de la plénitude du sacrifice et du désintéressement dans l’action. Camerone pour tout cela appartient non à tel ou tel régiment mais à l’ensemble de la Légion et son nom est inscrit sur tous ses drapeaux et étendards.
Faire « Camerone » est une expression passée dans le langage légionnaire.