Aujourd’hui, 19 mars 2022, je vous invite à remettre dans vos mémoires la fin de la guerre d’Algérie ? 60 ans déjà et les blessures demeurent, mal cicatrisées avec une relation franco-algérienne complexe qui bascule entre rapprochements et tensions. La France est meurtrie par une guerre qui a été une victoire de son Armée mais perdue par une bataille politique.



1830, la France a pris pied en Algérie en juin avec le débarquement de Sidi Ferruch, intervention tendant à contrer les pirates turcs qui écument la Méditerranée, mais réponse, aussi, à un contentieux financier sanctionné par une insulte du Dey au consul de France.
L’invasion française met fin à 3 siècles de domination ottomane, mais l’opération sera source de nombreux et longs conflits avec les populations locales.
1954, en Indochine, le camp retranché de Diên Biên Phu est tombé, les troupes ne quittent que progressivement le pays, l’Armée française dispose de moins de 50 000 hommes en Algérie.
Parallélement, des turbulances agitent le Maroc et la Tunisie qui accéderont à l’indépendance en 1956, de quoi penser que le fleuron de “l’empire français” restera calme.
Pourtant, l’Algérie s’enflamme, l’idée de l’indépendance est née, un petit groupe de nationalistes décide de la création d’un nouveau mouvement, le Front de Libération Nationale (FLN) doté d’une organisation militaire: l’Armée de Libération Nationale (ALN).
Les forces françaises restent dans l’incapacité de contrer une rebellion qui préfère le terrorisme aux combats traditionnels. Le gouvernement prolonge la durée du service militaire, c’est l’envoi des appelés du contingent en Algérie.
L’affaire de Suez, à l’automne1956, constitue une parenthèse dans les combats algériens, mais aux lourdes conséquences, Nasser, vexé de voir les Etats-Unis refuser de financer le barrage d’Assouan, a décidé la nationalisation du canal de Suez. L’Angleterre et la France s’estiment lésées et tentent une intervention militaire. A peine les hostilités engagées, à peine le succès entrevu, les combats cessent suite à un ultimatum lancé de Washington et de Moscou. Nasser se gargarise, en Algérie, les rebelles considèrent les hésitations franco-britannique favorable à leurs actions.
Entre-temps, les opérations se poursuivent sur le terrain. Le 10 février 1959, le nouveau premier ministre Michel Debré, de retour d’Algérie déclare : “l’Algérie est terre de souveraineté française, ceux qui y vivent sont des citoyens français”. Au conseil supérieur de défense, il est décidé de porter de 30 000 à 50 000 hommes les effectifs des harkas, ces unités combattantes composées d’algériens fidèles à la France. Dans un même temps, Alger s’inquiète, trop d’anciens fellaghas convaincus d’assassinat sont libérés. Le temps passe, sans la moindre clarification, jusqu’à la spectaculaire conférence de presse du 16 septembre 1959 et la nouvelle lancée par de Gaulle: l’autodétermination ! L’Armée ne pouvait pas s’attendre à la pratique d’une telle politique… Les “pieds-noirs” s’enflamment, se révoltent, c’est la fameuse “semaine des barricades”, une ville dressée contre le pouvoir avec la sympathie évidente des militaires.


Entre-temps, les opérations se poursuivent sur le terrain, les plans Challe sont des réussites, partout ou presque les rebelles sont dominés.
Les 2 référendums, le 8 avril et le 1er juillet 1962, donnent plus de 90% de oui au retrait de la France. Sept ans de guerre s’achèvent ainsi dans un climat d’amertume et de rancoeur généralisé surtout chez les Français d’Algérie. La politique algérienne du Général ratifie les accords d’Evian qui ne seront jamais respectés par l’Algérie, sans que la France y trouve à redire, ce qui témoigne surtout du détachement de la Métropole envers son emblématique colonie, c’est l’apparition d’un mouvement clandestin: l’O.A.S.

 

le FLN profita des accords d’Evian pour reconstituer ses forces armées et pour étendre leur autorité sur une grande partie du pays et de sa population. L’armée française s’y opposa jusqu’au 14 avril, puis dut y renoncer. A partir du 17 avril 1962, le FLN déclencha une vague d’enlèvements contre la population française, supposée complice de l’OAS, dans les agglomérations d’Alger et d’Oran, mais aussi dans l’intérieur de ces régions. Le 14 mai la Zone autonome d’Alger, dirigée par Si Azzedine, rompit ouvertement le cessez-le-feu en déclenchant une série d’attentats. C’est alors que le président de Gaulle, tout en demandant au GPRA de les désavouer, accepta l’avancement de la date du référendum algérien au 1er juillet proposé par l’Exécutif provisoire. D’autre part, des enlèvements et des massacres avaient été commis après le 18 mars contre d’anciens « harkis", en violation flagrante des clauses d’amnistie des accords d’Evian ; des tracts de l’ALN saisis par l’armée française faisaient craindre qu’une épuration systématique soit déclenchée après le référendum. Le respect de ces accords par le FLN semblait de moins en moins assuré, car le Conseil national de la Révolution algérienne (CNRA), réuni à Tripoli en mai et juin, les avait qualifiés de « plateforme néo-colonialiste", puis s’était divisé entre les partisans du GPRA présidé par Ben Khedda et ceux de ses opposants rassemblés dans un « Bureau politique" par Ben Bella. Mais pourtant le référendum du 1er juillet eut lieu dans l’enthousiasme avec la participation du FLN faisant campagne pour le oui.
Le 3 juillet, la France reconnut l’indépendance de l’Algérie sous l’autorité de l’Exécutif provisoire, qui devait organiser au plus vite l’élection d’une assemblée constituante souveraine.

Les accords d’Evian, voulus par le gouvernement français comme la « solution du bon sens », se révélèrent donc une utopie, qui échoua à ramener une vraie paix en Algérie. Le « rapatriement » des Français d’Algérie, et celui de « Français musulmans » (que le général de Gaulle ne considérait pas comme de vrais Français) s’imposèrent comme des nécessités.


Prendre la date du 19 mars 1962 pour celle de la fin du conflit algérien, c’est vouloir ignorer que l’Algérie au lendemain même de cette date est entrée dans une nouvelle phase de violences avec les réglements de comptes entre arabes partisans ou adversaires de la présence française; les assasinats de milliers de harkis par le FLN; la fusillade de la rue d’Isly, à Alger le 26 mars avec des dizaines d’Européens tués; l’exode des “pieds-noirs” vers la Métropole où le gouvernement n’a rien prévu pour leur accueil; les massacres d’Oran, le 5 juillet, où le FLN exécute plusieurs centaines d’Européens.
Comment, de ce fait, pouvons nous encore parler du 19 mars 1962 pour la fin de la guerre d’Algérie ?

CM