« Si j’avais su, j’aurais pas venu »
Phrase maladroite en mauvais français, mais qui, dans la vox populi dit bien ce qu’elle veut exprimer. La vie est faite d’acceptations et de renoncements qui ne dépendent pas toujours de la personne qui les vit. L’affaire du putsch, si souvent évoquée avec la même chanson, est l’illustration même d’une acceptation pas obligatoirement choisie. Parfois la vie choisit pour nous, dès lors tout regret est inutile et ne peut rien changer au passé. Cela peut en effet se transformer en mal-être, mais nous ne pouvons vivre toujours en regardant derrière comme pour se prémunir d’une poursuite entamée par nos vieux démons. Comme je le précise aujourd’hui encore dans un message adressé à un ami, Staline disait que l’Histoire "ne repassait pas les plats". Je pense que l’histoire individuelle ne les repasse pas non plus. Elle doit permettre, tout au plus, de redresser la barre pour ne pas commettre les mêmes erreurs… alors, à la lumière de nos expériences, reprenons le bon cap chaque fois que nous estimons que notre bateau dérive et s’éloigne de la bonne route. Cela nous évitera probablement trop de regrets et nous permettra de fredonner avec la grande Edith : « Non rien de rien, non je ne regrette rien. »
Bien souvent, lorsqu’il m’arrive de dire que j’ai fait une carrière à la Légion étrangère, mon interlocuteur, communément, me dit avoir beaucoup de regrets de ne pas avoir profité de l’opportunité qui s’était présentée à lui à une époque bien précise de sa jeunesse. Trop souvent aussi, il avoue que le motif qui le maintenait dans son confort relatif était une femme disparue depuis de son horizon; la sécurité d’un emploi, la peur de l’inconnu ou encore d'un effort physique en situations délicates conditionnent une situation que l'on croit incontournable. Le regret, alors, est le reflet d’un acte manqué, d’une opportunité ratée, d’une action non menée, de paroles ou gestes maladroits… Malheureusement, les regrets ne manquent pas, nous ne contrôlons pas tout ce qui nous arrive.
Les regrets, c’est aussi ce goût particulier “de sanglots longs des violons de l’automne”. Le parfum aigre-amer des erreurs, des nostalgies, car nous subissons tel un poète maudit, nos vagues à l’âme. Les beaux discours, pleins de bonnes intentions et de sagesse : “ce qui est fait est fait”, censés nous faire avaler l’amère pilule n’ont aucun effet lénifiant.
Un discours plus révélateur est tenu par les psychiatres qui prétendent que “ le regret n’est pas seulement une douleur du passé mais aussi une souffrance du présent”.
Même si le regret indique le décalage entre l’évacuation que nous faisons d’une situation du passé et celle que nous vivons aujourd’hui, c’est l’émotion qui accompagne toujours un regret.
Chez les anciens légionnaires, à quelques exceptions près, parfaitement ciblées, tous proclament, au sujet de leur passage dans les rangs de la Légion, que: “Non, rien de rien, non, je ne regrette rien…”
Pour revenir à mon interlocuteur qui me disait avoir des regrets de “carrière”, je lui demandais: “et si ce jour était le dernier ?”.
Il est intéressant de prendre connaissance d’une enquête informelle d’une infirmière, madame Bronnie Ware qui se présente en témoin “privilégié” des derniers moments de l’existence de personnes, en fin de vie et à qui elle demandait quels pouvaient être leurs regrets.
Elle notait que cinq formes de regrets dominaient:
1 “Si seulement j’avais eu le courage de vivre ma vie, et non celle que l’on attendait de moi”…
Quand une personne réalise que le rideau est sur le point de tomber, elle regarde en arrière avec objectivité. Les choix anciens peuvent être remis en question.
2 “Si seulement j’avais osé dire ce que je pensais”
Trop de gens refoulent leurs pensées profondes pour éviter des conflits et rester en paix avec les autres, quitte à y laisser quelques plumes.
3 “Si seulement je n’avais pas travaillé autant”
Tous disent ne pas avoir vu grandir leurs enfants, et n’avoir pas accordé assez de temps a à leur famille…
4 “Si seulement j’étais resté en contact avec mes amis”…
Tout le monde regrette ses amis au moment de mourir.
5 “Si seulement je m’étais donné le droit d’être heureux”
Le bonheur est souvent un choix, que nous ne faisons pas, coincés que nous sommes dans de vieilles habitudes confortables et de vieilles considérations, neutralisés par des faux-semblants et la peur du changement.
Si seulement…
Voilà ce qui me semble être un bien intéressant message envoyé en l’air à l’intention des vivants et que je livre à votre réflexion, en espérant une réception,
Encore et toujours Meilleurs Voeux !
CM