1955 : le 3e R.E.I. dans les Aurès.
Arrivée en Algérie : en janvier 1955, le 3e R.E.I. est de retour d’Indochine. Il est envoyé dans l’Aurès. La 2e compagnie du I/3e R.E.I. du capitaine Julien Camelin est envoyée à Guentis dans les Nementcha.
Janvier 1955 : le 18e R.I.P.C. du colonel Paul Ducournau, les légionnaires du 3e R.E.I. et le 17e B.C.P. gravissent le djebel Chélia, le plus haut sommet de l’Aurès. Dans le cadre de ces opérations longues et peu payantes, le tableau de chasse est réduit. C’est une opération de police : il faut deux gendarmes pour faire les sommations et seulement après, les soldats peuvent riposter. La situation s’est nettement améliorée dans l’Aurès ; l’arrivée des Tabors marocains et de la Légion Etrangère permet de relever les parachutistes.
23 février 1955 : la 6e compagnie du 2e bataillon inaugure les coups durs. Elle a le triste privilège d’enterrer les deux premiers légionnaires du 3e R.E.I. tués dans une embuscade.
Février 1955 : le 3e R.E.I. du lieutenant-colonel Thomas s’installe à Khenchela. Il implante sa compagnie de commandement régimentaire et ses deux bataillons autour d’Arris, la perle de l’Aurès. Le secteur d’Arris est le plus animé et l’un des plus dangereux de la zone des Aurès, berceau de la rébellion. Le 3e R.E.I. ne sera opérationnel qu’à fin mars. La base arrière est installée en Z.N.A.
18 mars 1955 : le secteur de Bou-Hamama accueille trois compagnies du I/3e R.E.I. La 1ère compagnie essuie le feu des rebelles dans le djebel Taourirt. Dès le début de l’action, 6 légionnaires sont blessés, dont deux mortellement. Les renforts arrivent. Dans le ciel, l’aviation effectue un straffing sur le chemin de repli des rebelles. C’est l’opération type, avec ses résultats payants ou non, mais toujours dure et incertaine, dans un décor rugueux et hérissé de djebels.
21 juin 1955 : la 4e compagnie, qui deviendra ‘’portée’’ commence son épopée sous les ordres du lieutenant Jaluzot. Elle se heurte à un groupe de rebelles qu’elle anéantit après un assaut donné par la section du sous-lieutenant Selosse
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En juin 1955, un bataillon de marche du 1er R.E.I., aux ordres du capitaine Bussières, est envoyé à Taberdga dans les Nementcha. Sa 11e compagnie réoccupe Djellal. En juillet 1955, ce B.M. devient le III/3e R.E.I.
Un 2e bataillon de marche constitué de jeunes légionnaires du 1er Etranger est envoyé au milieu du mois à Khenchela et installé sur le terrain de sports, qui est un bourbier en automne. Le vent y est glacial en hiver. Ce bataillon est installé sous des tentes, dans de conditions très dures. Il est rattaché au 3e Etranger le 1er juillet et part dans l’Aurès à la fin de l’année.
1er juillet 1955 : les B.M. N°1 et N°2 du 1er Etranger, constitués par la Maison Mère, sont rattachés au 3e R.E.I. Ils deviennent les 3e et 4e bataillons.
Les 4e et 6e compagnies sont équipées de scout-cars et d’half-tracks et prennent l’appellation de portées. Le caractère des opérations rend nécessaire le mouvement perpétuel des unités.
27 juillet 1955 : embuscade de Tafassour.
A 4 heures du matin, le premier convoi de ravitaillement part de Taberdga en direction du poste de Djellal occupé par la 11e compagnie du III/3e R.E.I.
Vers 5 heures, il traverse le village de Tafassour. Lorsque la queue du convoi franchit le pont sur l’oued el-Abiod, l’embuscade se révèle. Les rebelles ont l’avantage de la surprise, de la position et d’une puissance de feu étonnante. Ils criblent de balles l’escorte du convoi, attaquent au corps à corps, assassinent le médecin-lieutenant qui n’était pas armé, font tomber dans le ravin l’ambulance avec sa croix rouge. Il faut le courage des légionnaires de l’escorte, l’appui d’une section de la 11e compagnie arrivée en renfort, et la volonté du commandant Langlois pour redresser la situation. Le convoi est dégagé ; les 9e et 10e compagnies opèrent un mouvement autour du village pour encercler les rebelles. Le feu ennemi est extrêmement violent et concentré sur la 9e compagnie qui, ralentie par la difficulté du terrain, tente de déborder par les hauteurs.
Une heure plus tard, l’encerclement se précise et les rebelles se replient par petits groupes.
A 8 heures, tout est terminé. 13 fellagha ont été tués dans leur retraite. Le III/3e R.E.I déplore 26 morts, dont le médecin-chef, le lieutenant Bernard Plisson, et une dizaine de blessés.
La guerre est bien là dans les Aurès. C’est l’embuscade la plus meurtrière jusque-là effectuée en Algérie.
En septembre 1955, la 8e compagnie du 3e R.E.I. s’installe à Louestia près d’Arris.
A l’automne 1955, les bataillons du 3e R.E.I. sont en opération dans le secteur de Tighanimine ; les légionnaires se font accrocher
Fin 1955 : la 7e compagnie du 3e R.E.I., commandée par le lieutenant Billot, construit un poste digne de la grande époque à Rhoufi, face au djebel Ahmar Kraddou. Une fois achevé, ce poste porte le nom du lieutenant-colonel Alfred Rambaud, commandant en second du 3e R.E.I., mort en service commandé le 16.12.1955.
Jean Balazuc P.P.P.P.
Sources principales.
La Guerre d’Algérie – Soldats du djebel de François Porteu de la Morandière – S.P.L. 1979.
Site Mémoire des hommes du S.G.A.
Le 3e Etranger de Philippe Cart-Tanneur -Tanneur Tibor Szecsko – Editions du Fer à marquer 1988.
La bataille des monts Nementcha 1954-1962 de Dominique Farale – Economica – 2004.
Billot, lieutenant légionnaire, commandant la 7e compagnie du 3e R.E.I. qui construit en 1955 un poste digne de la grande époque à Rhoufi, face au djebel Ahmar Kraddou.
Bussières, colosse truculent ; adjudant au 11e Etranger en 1939, capturé par les Allemands lors de la défaite française de 1940, envoyé au camp de représailles de Rawa Russka après deux tentatives d’évasion ; évadé de ce camp ; officier de partisans français ; parti en 1946 avec la Légion en Indochine ; chef de peloton de réparations de la Légion à Bamako en Afrique noire ; commandant d’une compagnie du 1er Etranger à Mascara puis au Maroc ; capitaine légionnaire ; commandant le 1er bataillon de marche du 1er Etranger, envoyé à Taberdga dans les Nementcha en juin 1955. Ce B.M. devient en juillet 1955 le III/3e Etranger.
Camelin Julien, saint-cyrien sorti de Cherchell ; officier légionnaire à la 4e D.B.L.E. ; touché au poumon au cours de l’été 1947 à Madagascar. Dès son retour d’Indochine, il ne cache pas le sens de son combat en Algérie : il œuvre pour garder française cette terre qu’il a découverte lors de son stage à Cherchell durant la guerre ; commandant la 2e compagnie du I/3e R.E.I. dans les Nementcha en 1955 ; Commandant de compagnie au 2e R.E.I. puis d’E.M.T. au 5e R.E.I., il met ses actes en rapport avec sa pensée. Il ne ménage pas sa peine ; tout en se forgeant sans le chercher une réputation flatteuse ; avisé, méthodique, et tout autant avare du sang de ses légionnaires. Un des meilleurs chefs de guerre des unités d’infanterie de la Légion. Commandant de la Légion Etrangère, il participe au putsch d’avril 1961 avec son E.M.T. du 5e R.E.I. ; condamné le 20.07.1961 à trois ans de prison avec sursis, il quitte l’armée ; il repart en Algérie en octobre 1961 pour rejoindre l’O.A.S. ; adjoint militaire du général Edmond Jouhaud à Oran en novembre 1961, il est arrêté le 25.03.1962 ; décédé en octobre 1981 des suites de sa blessure à Madagascar.
Jaluzot Pierre Eugène, né en 1920 ; il s’engage au 25e B.C.A. en novembre 1940. Mis en congé d’armistice en 1942, il est rappelé au service en 1944 et part suivre les cours de l’Ecole spéciale militaire interarmes. Il arrive à la Légion à Sidi-Bel-Abbès en 1948. L’année suivante il est en Indochine avec le 3e R.E.I. Il prend en 1950 une section à la 2e compagnie du déjà très célèbre capitaine Mattei. Lieutenant, il va s’illustrer dans une série d’actions d’éclats sur la R.C.4 dont la plus célèbre reste sans doute l’héroïque résistance du poste de Bo Dung dans la nuit du 6 au 7 octobre 1960, qui permet de conserver pendant un temps précieux la liberté de manœuvre sur la R.C.4. Il retourne pour un deuxième séjour en Indochine, toujours au 3e R.E.I., commandant la 4e compagnie de 1954 à 1958 ; en Algérie, il commande la compagnie d’élite, la 4e compagnie portée en avril 1957 dans le M’Chatt. En 1959, il commande la compagnie d’instruction des cadres à Sidi-Bel-Abbès. De 1961 à 1963, il commande successivement la 4e C.S.P.L.E. puis la 2e C.P. du 2e R.E.I. Il quitte l’armée et la Légion en 1964 comme chef de bataillon, blessé trois fois, avec huit citations dont trois à l’ordre de l’armée sur la Croix de Guerre des T.O.E. et la Croix de la Valeur militaire. Colonel (C.R.). Il porte la main du capitaine Danjou à Aubagne pour Camerone, le 30 avril 1991. Profondément attaché à l’Institution, il est de 1987 à 1996 l’infatigable président de l’Amicale des Anciens Légionnaires de Paris. Décédé en 2002.
Langlois Pierre alias Lamoureux Pierre, né le 16.03.1917 à Barreda en Espagne où son père, ingénieur, était en poste. Après des études chez les Jésuites à Toulouse, il entre à Saint-Cyr en 1936 dans la promotion Soldat inconnu et en sort sous-lieutenant deux ans plus tard. Affecté au 1er Régiment étranger à Oran dès sa sortie de l'école, il prend part à l'expédition de Norvège avec la13e D.B.M.L.E. de retour sur l'Angleterre avec le corps expéditionnaire français le 19.06.1940, il choisit de rallier la France libre le 29.06.1940 avec la moitié de la 13e D.B.L.E. Il participe à l'expédition de Dakar, à la prise de Libreville au Gabon, avant de combattre avec la Brigade française d'Orient en Erythrée contre les Italiens. Il y est blessé de deux balles le 15.03.1941. Il prend le lendemain le commandement du groupe, faisant preuve d'un moral impressionnant. Après avoir reçu laCroix de la Libérationdes mains du généralDe Gaulleà Qastina en Palestine fin mai 1941, Pierre Langlois est engagé dans la campagne de Syrie au cours de laquelle il est de nouveau blessé le 19.06.1941 par balle. Le 1er B.L.E. est ensuite affecté à la 2e Brigade française libre du généralCazaudet prend part aux combats d'El Alamein (octobre 1942). Capitaine, il participe aux combats de Tunisie au cours desquels il se distingue par son sang-froid, notamment le 11.05.1943 à Takrouna. En Italie, il fait une nouvelle fois la preuve de son sens du combat dans les opérations de conquête du village de Radicofani en mai 1944. Le capitaine Langlois débarque en Provence avec la 1ère Division française libre le 16 août 1944 et participe brillamment aux combats de libération de Provence, de la Vallée du Rhône, des Vosges, d'Alsace et du sud des Alpes (massif de l'Authion). En mars 1946, il débarque à Saigon, toujours avec la 13e D.B.L.E., pour participer à la guerre d'Indochine. De retour en Métropole en juin 1947, il est promu chef de bataillon en 1949. En juin 1955, à Philippeville en Algérie, le 3e Etranger dont il commande le 3e Bataillon dans les Nementcha. Colonel, chef de corps du 3e R.E.I. d'août 1960 à août 1962 en Algérie, il reçoit deux citations distinguant ses qualités de commandement. Il sert ensuite en Allemagne. Général de corps d'armée en janvier 1973, Pierre Langlois exerce les fonctions de gouverneur militaire de Metz (1973-1975) puis de conseiller du ministre de la Défense jusqu'en mars 1977, date de son passage en 2e section. Pierre Langlois est décédé le 15.05.2013. Grand-Croix de la Légion d'Honneur ; Compagnon de la Libération - décret du 23 juin 1941; Croix de Guerre 1939-1945 (7 citations); Croix de Guerre des T.O.E.; Croix de la Valeur Militaire (3 citations).
Rambaud Alfred Antoine Charles, né le 04.09.1906 ; lieutenant-colonel, commandant en second le 3e R.E.I. ; mort en service commandé le 16.12.1955.
Selosse Jean-Marie, né en 1930 ; à la sortie de l’Ecole, le sous-lieutenant se porte volontaire pour l’Extrême-Orient où il découvre le monde des Képis blancs ; chef de section à la 4e compagnie du I/3e R.E.I., il s’y distingue et revient en 1954 avec une citation et deux étoiles d’argent à sa Croix de Guerre des T.O.E. ; toujours affecté à la 4e C.P. du 3e R.E.I., la fameuse compagnie d’élite du capitaine Pierre Jaluzot, il se distingue lors d’un assaut le 21.06.1955 ; adjoint au commandant de la compagnie, il se fait remarquer le 15.04.1957 lors de l’embuscade de M’Chatt à 10 kilomètres d’El-Milia ; après un séjour à Sidi-Bel-Abbès au 1er R.E., il devient lieutenant légionnaire parachutiste au 2e R.E.P. en 1960 ; chef de la 2e section depuis avril 1960 à Bou Sciar, adjoint au commandant de la 2e compagnie ; grièvement blessé sur le Chélia le 02.12.1960. Exfiltré après une évacuation mouvementée par hélicoptère, il est sauvé par une opération chirurgicale de la dernière chance ; il va lutter plusieurs jours entre la vie et la mort à l’hôpital Laveran à Constantine. Il participe en 1962 à l’installation de la Maison mère à Aubagne. Après une affectation au 2e R.E.I. où il prend le commandement de la 2e Compagnie portée au Sahara algérien, il prend le commandement du G.I.L.E. A son retour en Métropole, il est nommé chef du centre d’instruction et de préparation à Marseille. Lieutenant-colonel, il est commandant en second à l’Ecole technique des sous-officiers d’active. Promu colonel, il quitte l’armée en 1983. Il publie l’Arbre de proie qui réhabilite les combats dans le Djebel et qui reçoit le prix Erwan Bergot en 2002. Officier de la Légion d’honneur et de l’O.N.M. ; Croix de Guerre des T.O.E. avec deux étoiles d’argent ; Croix de la Valeur militaire avec deux palmes et une étoile d’argent. Il porte la main du capitaine Danjou à Aubagne pour Camerone le 30 avril 2003.
Thomas, chef de bataillon puis lieutenant-colonel, chef de corps du 5e R.E.I. du 25 novembre 1950 au 8 septembre 1951 ; lieutenant-colonel, nommé chef de corps du 1er R.E.I. le 3 avril 1953 ; colonel, nommé commandant du 3e R.E.I. le 1er juillet 1955 ; colonel, nommé chef de corps du 1er Etranger à Sidi-Bel-Abbès le 27 novembre 1956 jusqu’au 15 mai 1959.
Morts pour la France le 27 juillet 1955, dans les Aurès, à Tafassour, sur la piste entre Taberdga et Djellal, 25 légionnaires du III/3e R.E.I. : Plisson Bernard, né le 11.09.1927, lieutenant médecin ; Bellini Palmiro Vincenzo, né le 23.11.1917, sergent ; Et les légionnaires Alfonsi Carlo, né le 17.03.1927 ; Ali Oglou Kiza Erdoghan, né le 01.01.1928 ; Auer Johan, né le 21.12.1929 ; Bertoldi Leandro, né le 02.11.1921 ; Dautreau Julien, né le 16.05.1924 ; Ehlas Clauss Walter, né le 19.07.1933 ; Gruber Ferdinand, né le 05.08.1922 ; Hasenstab Raimund, né le 06.07.1927 ; Kaminski Hermann, né le 22.04.1928 ; Kurys Romer Andreas, né le 03.11.1929 ; Kuster Willi, né le 01.03.1928 ; Lindner Hans, né le 07.08.1925 ; Lopez José, né le 29.11.1929 ; Morel Georges Julien, né le 19.08.1925 ; Neynaud André, né le 30.11.1924 ; Pereira Albert, né le 10.02.1910 ; Perlongo Francisco, né le 18.10.1925 ; Schieske Heinz, né le 18.05.1929 ; Schleuter Werner, né le 09.06.1930 ; Schmidt Herbert, né le 20.10.1932 ; Slanina Ignatz Gerhard, né le 08.07.1932 ; Tietje Heinz, né le 12.11.1933 ; Vollenweider Ernest, né le 28.06.1933.