Le 2 novembre 2021, le Maire de Montferrat et son conseil municipal ont accompagné le président de l’AALE du Haut-Var et de l’Est-Var, Jean-Paul Bourdin, et le délégué FSALE, le colonel (er) Jean -Claude Bertout, dans le fleurissement des tombes des 16 légionnaires décédés en service ou retraités inhumés dans le cimetière de la commune, lieu civil de rattachement administratif du camp bâti de Canjuers.
La présence des légionnaire à Canjuers remonte au milieu des années soixante qui ont vu la Compagnie de Sapeurs-pionniers du 1er Etranger, héritière du 3ème Bataillon de Marche de la Légion étrangère, s’y installer après avoir participé aux travaux sur le camp de la Demande pour créer l’actuel Quartier Vienot à Aubagne.
Le camp de Canjuers, le plus grand d’Europe, fait alors l’objet de grands projets d’aménagement pour pouvoir y accueillir une brigade en manœuvre et y réaliser des tirs à toutes les armes, du pistolet automatique au canon d’artillerie.
La Compagnie de Sapeurs-Pionniers n’y suffisant pas, elle est intégrée au sein du 61ème Bataillon Mixte de Génie Légion en 1970. Pendant une dizaine d’année, le 61ème BMGL va réaliser le complexe du camp de Canjuers : camp bâti, camp baraqué, zones de bivouac, aires, champs et parcours de tirs, infrastructures techniques et routières...
Puis à partir de 1978, le 61ème BMGL est redéployé sur le camp du Larzac pour y effectuer des aménagements semblables, mais la situation politique locale oblige à reporter cet ambitieux projet et à détacher ses unités au profit des camps de Caylus, La Courtine, Souge, Coëtquidan...
La CRTRLE, la Compagnie Renforcée de Travaux Routiers de la Légion Etrangère, est créée le 1er août 1978 au moment du départ du 61ème BMGL.
Cette unité du 1er Régiment étranger est ainsi l’héritière de la 1ère Compagnie de Sapeurs-Pionniers (1ère CSP) d’Algérie dont la spécialité était la pose et la réfection des voies ferrées et de la Compagnie de Sapeurs-Pionniers qui a participé à la création du Quartier Vienot et précédé la création du 61ème BMGL.
Le commandement lui confie les missions d’entretien et d’amélioration de l’infrastructure et des routes et pistes du camp de Canjuers.
La CRTRLE, forte de 7 sections, comptait 240 hommes et servait quatre-vingts engins de travaux publics et autant de véhicules.
Toutes ces unités de Légion ont laissé sur cette terre varoise de nombreux légionnaires décédés en service ou retraités sur place.
Rappelons que ces différentes unités ont pendant plus de trente années fourni des renforts en légionnaires spécialistes « engins et travaux » aux autres régiments Légion, notamment ceux du 5ème RMP et 5ème RE, de la 2ème CT/13ème DBLE ou de la CE/3ème REI...
(Pour des informations plus précises se reporter à l’ouvrage de Pierre Dufour, « Génie-Légion de Sidi-Bel-Abbès au Kosovo » aux éditions Lavauzelle).
Enfin, le 1er juillet 1984, la CRTRLE a formé le noyau dur de la création du 6ème REGIMENT ETRANGER de GENIE (6ème REG) sur le camp de Saint-Maurice de l’Ardoise.
Colonel Jean-Claude Berthout.
Mémoire:
En cette période d’hommage aux morts, je gratte au fond de ma mémoire et je me souviens:
C’était en 1970, le ministre d'état chargé de la Défense nationale , Michel Debré venait présider l’inauguration du plus grand champ de tir d’Europe occidental de 35 000 hectares: Canjuers !
A l’époque, sergent-rédacteur à « Képi Blanc », j’assurais le reportage avec une bonne soixantaine de journalistes, le programme était dense et en dehors des différents discours et conférences nous avions le privilége très agréable de faire le tour du camp en hélicoptère. Pour montrer mon appartenance à la Légion, je m’étais coiffé d’un képi blanc. En fait, ce reportage mettait en valeur la compagnie de Sapeurs Pionniers que commandait le capitaine Catanéo, un des légionnaires du lieutenant Matteï dont le livre de Paul Bonnecarrère « Par le sang versé » avait rencontré un vif succès. Je venais, modeste jeune sergent, à la rencontre du passé indochinois de la Légion interviewer ce héros légendaire qui me fascinait et dont l’aventure et le courage affiché me passionnait.
Quelques dix ans plus tard, après un séjour dans le Pacifique à Mururoa, je me suis retrouvé affecté à la CRTRLE, compagnie isolée du 1er RE à Canjuers. Cette unité particulière venait de remplacer la Compagnie de Travaux du 61ème BMGL. Devenu officier adjoint du commandant d’unité le capitaine kampmeire, j’avais la charge d’organiser les obsèques quand un de nos légionnaires venait à décédé, souvent par suite d’un accident de la route ou d’un retournement d’un camion de la section pompiers. C’est ainsi que je faisais connaissance de la ville qui administrativement gérait le site de Canjuers placé sur son « territoire » : Montferrat. Nous inhumions dans son cimetière les corps non réclamés de nos légionnaires, morts en service. De plus, comme cela se passe partout où la Légion s’implante, les villes proches de sa garnison attiraient un bon nombre d’anciens envoutés par le charme d’une retraite paisible (ou non) proposée en très bonne compagnie…
Je revenais en 2007 sur les lieux accompagné de l’ancien capitaine Philippe Morand qui habitait la région à Draguignan et qui s'était touvé en ma compagnie lors de mon séjour à Canjuers. C'était un 2 novembre pour être précis, je souhaitais me recueillir sur les tombes de ceux qui étaient tombés au service de la Légion et de la France. Nous assistions alors, à un poignant hommage qui était organisé par l’amicale du Var, sobre mais petite cérémonie de bon ton qui fut suivie d’un repas au village avec la présence de monsieur le Maire qui semblait bien apprécier la Légion. Ce dernier me faisait part de l’honneur qu’il ressentait d’avoir dans le cimetière de la ville ces défunts légionnaires qui le liaient indirectement à l’histoire des légionnaires batisseurs, soldats d’exception dont il avait l’admiration.
Les tombes, à l’époque, étaient entretenues par un ancien caporal-chef, un ami de longue date, Antunes qui avait fait le choix de vivre à Montferrat une fausse retraite de coupeur et de coureur de bois.
"La Légion n'abandonne jamais ses morts !"
CM