Avant propos:
Notre site affiche une fréquentation de visiteurs incompréhensible ou tout au moins très curieuse qui ne respecte aucune logique et aucune règle bien définie. En fait, tous les articles n’offrent pas le même intérêt pour les lecteurs ; rien de nouveau à ce sujet, nous savons en le constatant dans la presse que pour attirer les ventes, il faut aussi passer par les évènements appelés « accrocheurs » et qui potinent en équilibre sur la fragile frontière où commence et s'arrête la vie privée. Notre site heureusement, n’est pas vendeur et nous nous contentons de relater tout ce qui touche de près ou de loin notre Légion et nos Amicales sans jamais aborder la fascinante chronique populaire qui fait les beaux jours du café du commerce et des charmantes conscierges dans les escaliers…
Notre site sert de liaison, d’info et de communication, certaines amicales ont parfaitement compris que le fait de parler d’elles était un très bon moyen d’attirer l’attention d’autant qu’une parution sur le site se traduit automatiquement par une publication dans notre magazine « Képi Blanc ».
Aujourd’hui, nous publions en plusieurs parties une « chronique laotienne » rédigée par le lieutenant-colonel (er) Antoine Marquet et le commandant (er) Jean-Pierre Raoul, tous deux anciens officiers ayant porté le képi blanc.
Jean-Pierre Raoul, du lointain de son lieu de résidence : la thailande s’intéresse à tout ce qui touche notre Légion, c’est ainsi, les années passées à servir notre Légion nous laissent une marque indélébile et une fidélité à jamais enfouie au fond de nous-même… Dans une de ses lectures, sa curiosité est attirée par le livre : « les chemins de Dien Bien Phu » de francis Mirmont – éditions Nimrod 04/2015 – page 246. L’auteur parle de combats meurtriers dans la région de Mouang Khoua au nord du Laos où se trouvait impliqué le commandant Cararibière. Passionné par le récit, Jean-Pierre Raoul, de sa Thaïlande adoptive, en parle à Antoine Marqué vissé au fond de son Portugal natal et tous deux décident de s’aventurer sur les traces de leurs anciens pour une aventure rocambolesque à souhait, forte de rebondissements et nous offrent le récit de cette curieuse aventure en une « chronique laotienne » que nous vous proposons aujourd’hui en lecture découpée plusieurs chapitres.
Coincidence: notre Camerone légionnaire en 2024 évoquera la bataille de Dien Bien Phu qui s'est déroulée il y a 70 ans et qui a provoqué la fin de la guerre d'Indochine d'une bien triste manière. La Légion étrangère, sur cette terre vietnamienne et laotienne y a laissé le plus grand nombre de morts de son Histoire...
Bonne lecture !
CM
Chapitre premier :
"C’est en juin que mon camarade Jean-Pierre Raoul, chef de bataillon en retraite, m’a parlé pour la première fois de la découverte, au gré de ses lectures*, de combats meurtriers dans la région de Mouang Khoua au nord Laos qui ont impliqué le 2e bataillon du 3e REI aux ordres du commandant Cabaribère, une colonne du 5e Tabor aux ordres du commandant Vaudrey, 3 compagnies de Laotiens et une compagnie de supplétifs. Il a décidé de tenter d’élucider cette affaire en se rendant sur les lieux 70 ans après. Pour ce faire il a constitué un dossier très complet, solide, sur les événements dramatiques qui ont vu la disparition du 2e bataillon du 3e REI, tout comme d’importants éléments du 5e Tabor et les unités des Chasseurs Laotiens.
Voilà comment deux lignes dans un livre aboutissent à un voyage sur les traces de nos anciens. Se sont joints à mon camarade Raoul (nous avons servi ensemble dans trois régiments et sommes de la même promotion), le général Jean Baillaud (promotion Général Rollet) avec lequel nous avons fait une année d’application à l’EAI et le caporal-chef Jacky Biaugeaud, président de la FACS Thaïlande et moi. Une contrariété administrative a empêché Jean-Luc Martin, colonel de son état, de se joindre à nous. Tous habitent en Thaïlande et ont eu la bonne idée de m’inviter - j’habite au Portugal - à participer à cette équipée mémorielle.
Cette chronique se propose de relater ce voyage tout en remémorant le contexte historique de l’époque, établi grâce au JMO du II/3e REI et au rapport établi par le commandant Cabaribère lui-même. Nous, anciens légionnaires, n’avions jamais entendu parler de cette affaire.
21 janvier 2024
Après un long voyage me voici rendu à Vientiane, capitale du Laos, dans un hôtel où je dois attendre l’arrivée de mes camarades prévue pour le lendemain.
22 janvier 2024
Dans l’après-midi nous nous retrouvons dans un bel hôtel, La Seine, sur les bords du mythique Mékong. Je n’avais pas vu Baillaud depuis 43 ans, Raoul depuis une trentaine d’années et je faisais la connaissance de Jacky Biaugeaud.
La traversée de la ville entre les deux hôtels m’a permis de constater une saleté toute orientale et l’impressionnant câblage électrique et téléphonique de cette capitale. Rien que cela devrait la conduire à devenir patrimoine de l’humanité !
Les premiers contacts avec des Laotiens laissent deviner un caractère aimable, indolent, qui se confirmera tout au long du voyage, et très amical envers les étrangers. Un conducteur de « tuc-tuc », échancre sa chemise pour nous montrer fièrement son maillot nº 7 de la Fédération française de football !
Après un excellent dîner en terrasse, au sommet de l’hôtel, d’où nous pouvons admirer le coucher de soleil sur le fleuve et la Thaïlande située sur l’autre rive, à un jet de pierre, nous avons visité le centre-ville en quête de bistrots disparus et seulement présents dans la mémoire de Raoul (!)…
Le lendemain matin, recherche sans succès d’une boulangerie française disparue elle aussi ; nous avons opté pour un petit déjeuner à notre hôtel.
Raoul nous a alors présenté le dossier remarquablement établi par lui concernant aussi bien la partie « militaire » que toute la logistique du voyage, les réservations, les trains, les déplacements en pirogue… travail remarquable que nous tous avons salué.
Le 23 janvier 2024
Après une nuit dans des suites surclassées par la gérante, une aimable sino-française vaguement bordelaise, en taxi nous avons relié la gare de Vientiane, éloignée de la ville, pour y prendre un train qui n’a rien à envier à ceux de notre SNCF. Les gares extrêmement modernes et fonctionnelles ont été construites par la Chine tout comme l’ensemble des lignes et des trains qui y circulent. Les conditions de sécurité pour pénétrer dans ces gares sont aussi strictes que celles devant être observées dans les embarquements aéroportuaires ! Ce train nous a emmenés à Muong XAI après trois heures d’un agréable voyage surveillé par une très aimable hôtesse-contrôleuse qui signalait l’interdiction de consommer de la bière à bord. A ce propos un cocasse épisode nous a surpris. L’un de nous avait apporté deux canettes de bière dans son sac à dos. Au passage de la sécurité elles lui ont été enlevées tout comme un petit couteau qu’il portait dans son sac. Mais dans le hall de la gare les bières sont en vente libre et les voyageurs peuvent s’y approvisionner ! Trop occupés par les bières et le petit couteau, la sécurité a ignoré le grand couteau de chasse qui se trouvait également dans ce sac !
Arrivés à Muong Xai vers 16 heures nous avons pris un taxi pour Mouang Khoua notre objectif, au centre même des zones des combats du 2e bataillon du 3e REI. Nous nous installons dans une « Guesthouse » dans cette petite ville perdue du nord Laos. La gérante, peu familière avec internet, avait reçu une lettre envoyée de Thaïlande par Jean-Pierre pour nous réserver les chambres. Pas facile pour la dame et pas sûr pour nous. Endroit sympathique où l’on disposait d’un balcon sur un affluent de la Nam Ou, la Pak Ou.
Le dîner dans un restaurant proche s’est révélé un échec ! Commandes passées, une heure d’attente et nous avions été oubliés dans un restaurant pratiquement vide, ouvert sur la rivière, venteux en diable et avons dû nous contenter d’une vague soupe chaude… Mouang Khoua s’annonçait mal !"
A suivre: